Il faut que les uns et les autres sachent que la loi du 31 mai 1963 est une réponse du législateur à l’affaire Colette Meku, une jeune fille d’un village proche d’Oyem que son père avait mariée alors qu’elle n’avait qu’un an. À onze ans, et en fin d’études primaires, son père décide de la conduire chez son prétendu mari. Aidée par sa mère, la jeune fille, opposée à ce mariage forcé, fuira la maison familiale pour aller se réfugier chez les Sœurs bleues de Castres qui dirigeaient l’école des filles d’Oyem. Sa mère subira les représailles de son père et ses frères aînés.
En 1961, la jeune fille écrira une lettre au président de la République, Léon Mba, pour lui exposer sa situation. Dans sa réponse, le président s’opposait au mariage forcé de la jeune fille et ordonnait que la dot perçue par le père soit intégralement remboursée. Léon Mba chargea aussi, Pierre Fanguinoveny, alors préfet du Woleu-Ntem, de suivre et de régler cette affaire sur place. Après la rencontre avec le préfet, le père de Meku, apeuré, cessa les brutalités sur son épouse et accepta que sa fille continua ses études chez les religieuses.
Pierre Fanguinoveny et son administration avaient été aussi instruits par Léon Mba de mener des enquêtes dans les écoles de sa circonscription administrative, afin de relever les noms de toutes les jeunes filles qui étaient victimes de mariage forcé.
C’est à la suite du rapport du préfet du Woleu-Ntem sur les mariages forcés que Léon Mba prit la décision de s’attaquer de front aux abus sur la dot. Il prit donc l’initiative d’un projet de loi visant à interdire la pratique de la dot dans le mariage coutumier. Le 31 mai 1963, le projet de loi fut adopté à l’Assemblée nationale.
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Source: thèse de doctorat d’État de Jules-Aristide Bourdes Ogoulouguende.