C’est la question qui revient sans cesse dans l’opinion depuis que le fils et héritier putatif d’Ali Bongo Ondimba et de Sylvia Valentin multiplie les sorties de pistes : injonctions aux députés par courriers, gestion opaque des fonds alloués à la riposte contre la Covid-19 etc sont là autant d’actes qui questionnent sur ses capacités à porter le destin de la nation.
C’est par un courrier daté du 21 avril que Nourredin Valentin Bongo a instruit le président de l’Assemblée nationale Faustin Boukoubi afin que les 1223 tonnes de vivres consécutifs de son don soient remis entre « Les 143 députés constitutifs de son institution, ce dans les meilleurs délais, pour une distribution aux populations de leurs sièges respectifs ».
Ce courrier du citoyen Nourredin intrigue. Il a surtout eu l’audace d’interroger ceux qui susurrent aux oreilles de ce diplômé de la prestigieuse école d’Eton en Angleterre. Un citoyen qui instruit ou, plus clairement, donne une mission au président de l’Assemblée nationale, c’est le genre de choses qu’on ne voit plus, même dans les républiques bananières. Cette action a-t-elle eu au préalable un filtre de la part de sa garde rapprochée ? Sans être un clerc en droit, la nécessaire séparation des pouvoirs édictée par Montesquieu dans De L’Esprit des lois en 1758 doit l’interpeller.
Ce don est entrain de vivre des situations épiques. Les députés chargés de le distribuer dans leurs circonscriptions vont de charybde à scylla. C’est le cas dans le canton Koum-kess, notamment du village Awoua , siège du député David Ella Mintsa. Ils ont refusé unanimement de prendre les cartons de cuisses, de sucre, d’huile, de savon. Ces populations ont crié haro sur ce qu’elles considèrent comme une insulte.
Le même scénario a été vécu dans le département de la Djoueri Agnili dont le chef lieu est Bongoville où siège Malika Bongo. Les populations de Karbala ont pris le préfet en grippe, venu leur partager les vivres. Malika, la députée titulaire ne s’était pas déplacée elle-même et a refilé la patate chaude au préfet qui a fait face à une remontée d’adrénaline des jeunes du coin.
Pourquoi Nourredin n’est-il pas allé lui-même distribuer ces dons ? Lorsqu’on fait un cadeau d’une telle ampleur aux parents, mères, sœurs et frères, il faut le remettre soi-même aux ayants droit. Dans les traditions africaines, on ne refuse ni ne rejette une aide d’un enfant qui honore ses parents. Surtout la première fois. De plus, et c’est connu, c’est de l’abondance du ventre que la bouche parle comme on a coutume de dire. Aussi, Nourredin, aurait-il pu accéder à certaines confessions sur les relations entre les élites des coins et les populations. Et lui de rassurer et faire taire les nombreuses « on dit » le concernant. Dans l’arrière pays, les gens parlent encore avec le cœur. Le contact rompt les barrières de l’appréhension et de la suspicion.
Dans les couloirs du Palais Léon Mba, certains députés qui sont en attente de distribuer le don de Nourredin, hésitent désormais au vu de la très forte hostilité des populations observée ailleurs. Ils accusent, sous cape, le bienfaiteur de les avoir mis sur le fait accompli. Cette opération, selon ses concepteurs, se voulait être un test de popularité grande nature du rejeton d’Ali, connait un flop depuis son début. Il est plutôt devenu un test d’impopularité du coordonateur général des affaires présidentielles. Cela ne peut surprendre que les naïfs.
On ne cessera jamais de le dire, Nourredin doit sortir de son bunker afin d’être en prise directe avec les populations. Il doit plonger les mains dans le cambouis. La distribution du don aurait pu être un excellent alibi pour faire le tour du Gabon et prendre son pool. Une occasion manquée. Est-ce pour respecter les injonctions de l’Elysée ? Probable.
Autre fait, la gestion de la manne de la Covid-19. Outre le fait que les propositions du Premier ministre Julien Nkoghe Bekale ont été retoquées, tout le budget alloué par le chef de l’Etat à la somme de 250 milliards est tombé entre les fourches caudines du bord de mer, devenu un trésor bis. Qui mieux que le Premier ministre pouvait dire ce désarroi au point d’encourager la haute représentation à faire un audit sur les fonds alloués à la riposte contre la Covid-19 devant les députés ébahis. Ce Poncepilatisme de Julien traduit surtout les relations délétères qui existent entre le gouvernement et le bord de mer.
Qui conseille donc le petit Nourredin Valentin ? Dans le cercle très fermé de ses innombrables conseillers, il y a la première sphère : la famille et les amis. En tête, Sylvia Bongo Valentin sa mère et première dame. Omniprésente, c’est elle qui « pousse » le rejeton à aller à l’assaut du fauteuil présidentiel. Envers et contre tout.
Ensuite, il y a Maixent Accrombessi. Il a réussi, on ne sait trop comment à revenir dans les bonnes grâces du couple présidentiel. Selon les mauvaises langues, ce sont leurs intérêts économiques et d’affaires qui auraient motivés un retour de raison auprès d’Ali. Ce gourou corvéable a été à l’initiative de la chute du faucon blanc, Brice Laccruche Alihanga, une autre oreille du couple présidentiel.
Sans réelle envergure stratégique sur le plan politique, Maixent Accrombessi serait passé maître dans l’art des intrigues politiciennes internes où certaines nominations dans la haute administration voire, du gouvernement seraient de son fait. Dans la perspective de 2023, son salon ne désemplit pas. L’homme, aux dires de certains, serait impliqué dans tous les dossiers économiques où son flair fait des émules.
Le roi d’Abomey garde toujours son influence intacte. Mais qu’attendre d’un souffleur qui a été plus de cinq ans durant, l’oreille d’Ali et dont le mandat a été au cœur des plus gros scandales de la république : arraisonnement de l’avion présidentiel au Benin rempli d’escorts, mise en examen en France, chantier des 5000 logements dont les marchés ont été attribués de gré à gré aux coquins ? Les mêmes causes produisant les mêmes effets.
Ali Agbar Onanga Y’Obegue. Son retour est assurément gagnant après son éloignement forcé de la scène politique. Le roi Teke se veut désormais garant des intérêts du clan dans le haut-Ogooué. A l’heure des grands choix de 2023, Ali Agbar aurait promis de ramener une Haut Ogooué fractionnée aujourd’hui pour faire bloc autour de Nourredin. Selon les mauvaises langues, il serait très écouté par ce dernier.
René Ndemezoo Obiang. Certains susurrent qu’il est souvent consulté à certains moments pour avoir une idée sur le grand marécage infesté de crocodiles de la politique gabonaise.
Viennent les officiels qui constituent l’ossature de son cabinet. Parmi ceux-ci, Laetitia Yuinang, conseillère juridique et administrative. Proche du coordinateur des affaires présidentielles, elle a déjà travaillé avec lui à Olam, où cette dernière était directrice juridique. La lettre rédigée aux députés, c’est elle au vu de son profil et du poste qu’elle occupe au sein du cabinet de Nourredin. A-t-elle entendue parler de la séparation des pouvoirs ? Ou, se croit-elle encore à Olam ?
Au-delà du parallélisme des pouvoirs, la lettre aurait dû être envoyée au Secrétaire général du PDG, Eric Dodo Bounguendza, Nourredin étant membre du bureau politique pour le compte du Haut-Ogooué. Devant un tel projet, il faut s’entourer de personnes qui l’habillent afin de ne pas choquer ou tomber dans la forclusion. Cette injonction ne s’adressait pas uniquement aux députés du Pdg mais également à ceux de l’opposition, sans avoir au préalable consulté les présidents des partis politiques dont ils dépendent. Un vrai travail d’ados !
Lorsque nous titrions à la Une du numéro 9 du mois de novembre 2019 « Un ados au sommet de l’Etat », certains ont cru à une attaque personnelle adressée au coordonateur général des affaires présidentielles. Que nenni ! A preuve. Nous estimions et c’est toujours le cas, qu’il n’avait ni l’âge psychologique ni l’âge politique pour occuper le poste à lui gracieusement offert par ses parents. Les bévues risquent de s’enchaîner davantage.
Emmanuel Lerouei, Économiste, ancien patron du bureau Afrique centrale de Performances Group, le cabinet qui a conçu le Plan stratégique Gabon émergent. Il est un incontournables dans les domaines de stratégie de développement. Il aurait contribué à la mouture du plan riposte contre la Covid-19 dont le budget est de 250 milliards de francs CFA.
Max-Samuel Oboumadjogo( Massassi), communicant. Il est en charge de sa communication et des affaires sociales. Sans avoir une grande influence auprès de Nourredin en dehors du Hip-hop dont ils vouent une véritable passion, le travail de Max-Samuel Oboumadjogo reste ambiguë. La décision du don et son implémentation, c’est lui. La cacophonie qui règne dans sa distribution questionne sur son rôle auprès du coordonateur général.
Au-delà, Nourredin Valentin peut avoir les conseils de Djessyé Ella Ekogha en charge de la communication présidentielle, de Mohamed Ali Saliou, directeur de cabinet adjoint du président. Tous, aussi jeunes que lui sont des aides à la décision. Tous les amis du roi n’étant pas à la cour, le cercle de Nourredin ne doit pas être circonscrit à la seule présidence.