Au temps du défunt OMAR BONGO ONDIMBA, président fondateur du Parti Démocratique Gabonais (PDG), et plus tard de son successeur, son fils ALI BONGO ONDIMBA, Distingué Camarade Président du parti, il est frappant de constater que le discours tribaliste n’avait jamais été aussi présent ni aussi toxique dans l’espace public.
Pourquoi ? Parce qu’aussi contestables que puissent être certaines pratiques du régime, le pouvoir savait tenir d’une main de fer le couvercle de la marmite identitaire, conscient qu’un relâchement sur ce terrain pouvait embraser tout le pays. Le PDG, parti-Etat par excellence, avait compris que le moindre glissement vers la tribalisation du débat politique aurait été une menace directe à sa survie et à la stabilité même de la nation.
1. Une gestion volontairement centralisée du pouvoir, mais symboliquement inclusive
Sous Omar BONGO, les équilibres régionaux et ethniques étaient savamment dosés dans la composition des gouvernements, des hautes administrations et même dans les affectations militaires. Le clientélisme y était, certes, une réalité, mais il n’était jamais assumé sous un prisme tribaliste. Il fallait maintenir l’image d’un Gabon unifié derrière un pouvoir central fort, même si chacun savait que les lignes de fracture existaient en souterrain. Mais elles n’étaient ni exacerbées publiquement, ni institutionnalisées dans les discours.
2. Le discours politique restait national, non identitaire
Jamais un responsable du PDG, ni même un baron local, n’aurait osé tenir des propos ouvertement tribalistes dans un meeting. C’eût été une faute politique grave, immédiatement réprimée. Le PDG s’est toujours voulu un parti national, au-dessus des clivages tribaux. C’était même sa ligne de défense face à une opposition souvent accusée, à tort ou à raison, de fonctionner sur des logiques de régionalisme ou d’ethnocentrisme. En d’autres termes, le PDG se positionnait comme l’ultime rempart contre la balkanisation tribale du pays.
3. Une stratégie politique qui visait l’unité, même par le contrôle
Certains diront que cette paix sociale relative était artificielle, qu’elle reposait sur la peur, la répression ou la manipulation. Peut-être. Mais le fait est là, le tribalisme n’était pas un thème de campagne. Il n’était pas un argument électoral. Il n’était pas une arme politique assumée.
Aujourd’hui, ironiquement, alors que le pays est censé entrer dans une ère de rupture, on assiste à un retour inquiétant de la parole tribaliste, décomplexée, parfois même brandie comme un étendard de légitimité. Certains n’hésitent plus à appeler au vote ethnique, à revendiquer des origines comme critères de compétence ou d’accession au pouvoir. Une régression dangereuse.
4. Le danger du tribalisme comme arme politique, une pente glissante
Il faut oser dire les choses, le tribalisme n’est pas une alternative politique, c’est une maladie de la démocratie. Et ceux qui aujourd’hui en font un fond de commerce, parfois au nom d’une revanche post-régime, jouent avec le feu. Car une fois le ver tribaliste introduit dans le fruit républicain, il ronge l’unité nationale de l’intérieur.
En conclusion, le PDG sous Omar Bongo, puis sous Ali Bongo, malgré toutes ses dérives autoritaires, avait au moins cette ligne rouge, ne jamais tribaliser le débat public. Aujourd’hui, les héritiers autoproclamés du changement risquent de faire pire que ceux qu’ils ont combattus, en réveillant les vieux démons que même la les régimes précédents avaient su contenir.
Et cela, le peuple gabonais doit l’avoir en mémoire. Car le tribalisme n’est jamais le début d’une justice réparatrice, mais toujours le prélude à un chaos fratricide.
Hugues MBOUMBA NGUEMA, Ancien Maire Adjoint au Premier Arrondissement de Libreville, MCN de droit au PDG.