Le débat de Missélé eba’a: Des changements réalisés, le commentaire qui sied.

En l’espace d’un clin d’œil, la République gabonaise s’est vue confectionner un costume autre, matérialisé par la mise en place (1) d’un Haut-commissariat. D’aucuns disent que c’est un véritable réservoir de sages quand d’autres pensent qu’il a tout d’une maison de retraite d’un nouveau genre. Quelle est leur réelle poids ou influence politique si tant est que leur objectif serait de racoler les électeurs gabonais en faveur d’Ali Bongo?

Dans les changements réalisés, on compte également (2) un remaniement gouvernemental encore plus bancal que les précédents. La multiplication de profils légers et même sulfureux annonce déjà et sans ambiguïté l’avènement d’une fin anormale au regard du challenge électoral présidentiel corsé qui pointe à l’horizon. Rien des observations et attentes de 2016 n’ont été prises en compte pour espérer que le déchaînement des populations en colère et au bout du rouleau ne soit pas au rendez-vous.

On ne peut ne pas citer les récents chamboulements opérés dans le PDG. Ils ne sont mêmes plus de l’ordre du viol politique mais bien du meurtre. Rien que la lecture des changements faits, dans un espace autre que le siège du parti, était la preuve que le vice et la malice étaient bel et bien présents. Le départ du secrétaire général du parti, tel que réalisé, correspondait-il à l’esprit des textes ou aux usages établis au sein du parti démocratique gabonais? Non est la réponse qui sied.

Tout compte fait, c’est un véritable requiem pour l’ère Bongo omarienne qui fut chanté au sein du PDG. Autrement  dit, tout ce qui pouvait rappeler le fondateur du PDG, son style de gestion ou l’esprit même qui alimentait cette période a été gommée pour ne pas dire totalement effacé. Quoi de plus surprenant quand dans la foulée on en vient à chasser de la garde républicaine un fils d’Omar Bongo Ondimba? C’est dire qu’Omar Bongo est mort, y compris dans les symboles.

Les questions qu’on peut aisément se poser après ce vacarme sont: (1) Pourquoi ces changements brusques et nombreux? (2) Étaient-ils nécessaires ou opportuns au regard du contexte? (3) Offrent-ils une quelconque espérance politique?

Ce qu’on peut déjà dire c’est qu’on tend à assister à un véritable bras de fer entre Ali Bongo qui souhaite rester au pouvoir et les siens qui pensent que leur heure pour prendre de manière effective le pouvoir a sonné. Si Ali Bongo a perdu le PDG qui ne porte en rien son ADN politique, visiblement il semble s’être constitué une base arrière politique via le haut-commissariat de la République. C’est dire que son contentieux préélectoral a déjà commencé mais dans la maison.

Pour ce qui est des choix, aussi bien au parti que dans l’administration en général, les collégiens du bord de mer apprendront, le moment venu, et à leurs dépens que l’inexpérience en politique est une tare. Et ce n’est pas la collection de profils sans consistance choisie qui pourrait leurs permettre de valider leur ambition. Aller à une élection présidentielle avec un bilan peu vendeur, un chef de parti inconnu, un patron de l’administration impopulaire, voici le boulevard servi à l’échec.

Le contexte politique est tellement sensible que le moindre faux pas leurs sera fatale. Ce n’est nullement un secret si nous affirmons qu’en 2016, si Guy Nzouba Ndama avait été à la place de Jean Ping face à Ali Bongo Ondimba, aujourd’hui, on parlerait d’autres choses. A partir de cet instant, l’impertinence des récents changements opérés annonce les couleurs sauf si dans le pouvoir en place, un cadre valeureux lève la tête et affiche son ambition en créant une véritable rupture avec la gouvernance en cours. C’est à ce niveau que les cadres du système, naviguant dans l’opposition, gardent un avantage politique non négligeable face à ceux encore assis dans le pouvoir.

Enfin, dans ce qui est observable, il faut préciser que les populations gabonaises n’ont pas la tête déchirée. Le tableau qui est servi aux gabonais tant à montrer qu’à tous les coups, les collégiens du bord de mer veulent être gagnants. Autrement dit, soit ils réussissent à chasser Ali Bongo du pouvoir pour s’y mettre et diriger à leur façon. Soit ils continueront à se cacher derrière Ali Bongo pour prendre toutes les piètres décisions qu’ils collectionnent aujourd’hui. L’entourloupe ayant été démasquée, les gabonais,  silencieusement, attendent l’heure des hostilités.

C’est à ce moment qu’ils comprendront que la politique a ses codes qu’il n’est pas bon d’ignorer. Jamais la France ne soutiendra les promoteurs du Commonwealth ou les amis de Vladimir Poutine. La force tranquille qu’elle est saura rappeler aux imprudents au sommet de l’État, les limites de leur arrogance. Voilà qui est dit pour ce qui est du manque d’expérience en politique et la conséquence de l’impertinence de certains choix effectués.

François Mitterrand rappelait à juste titre que le pouvoir ne se donne pas, il s’arrache. Mais pour le faire, il faudrait un minimum d’intelligence et de sagesse. Or, pour l’heure, ni l’un, ni l’autre n’est affiché au compteur. L’avenir a tellement été méprisé par ces individus qu’il est venu l’instant de la récolte de leurs choix impertinents.

Par Télesphore Obame Ngomo

 

Paul Essonne

Journaliste

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