La CAF dans la tourmente : une élection sur fond de corruption.

L’imbroglio juridico-judiciaire qui secoue la Confédération Africaine de Football (CAF) est de notoriété publique, dans la mesure où le Président de l’institution, Ahmad Ahmad devrait sa place de Président de la CAF à la FIFA, ou plus exactement à Giani Infentino qui a distribué des liasses de billets, des montres en or et même déployé des escort-girl pour le faire élire. C’est ce qu’affirme le journal norvégien Josimars.

Face à cet impressionnant déploiement des moyens financiers, Issa Hayatou qui avait hissé la CAF au niveau mondial ne pouvait pas faire le poids. Il suffisait comme d’habitude d’utiliser les arguments traditionnels nécessaires pour le discréditer et le faire passer pour un incapable et un corrompu. Contre un Africain, ce type d’arguments marche toujours. Et nous sommes toujours, nous subsahariens les premiers à l’adopter et à l’amplifier.

Seulement, le nouveau dauphin (donc Ahmad Ahmad), celui qui prenait la place du vieux Issa Hayatou n’était qu’une marionnette, un pion, un agent au service de la FIFA. Il lui devait sa place et ne pouvait donc que mettre en marche sa stratégie. Son choix n’était pas innocent il faut le préciser. On le savait fragile, maintenant il fallait le piéger pour qu’il obéisse au doigt et à l’œil. Alors, on sort l’artillerie lourde les femmes, l’argent et tous ce qui nous fait généralement frétillé. L’oiseau est définitivement en cage. On lui demande de rompre le seul contrat qui permet à la CAF de payer les salaires et de tenir ses engagements, ce n’est pas grand-chose mais ça fait bouillir la marmite et ça paye les voyages et les factures courantes, le contrat Lagardère de 1 milliard de dollars sur 12 ans qui a déjà bouclé 6 est tout simplement et purement rompue. Rien d’autre pour le remplacer, aucune autre source de revenus. Alors, sans argent la CAF est désormais à la merci de la FIFA. Elle ne peut compter que sur elle pour vivre. Elle dicte désormais sa loi, méprisant au passage une solution financière africaine initiée par l’Union Africaine des Radios et Télévision (UAR) que dirige Grégoire Ndjaka. Une piste balayée d’un revers de la main par la FIFA.

A Rabat, il va d’ailleurs susciter contre lui la colère de tous les cadres et patrons du foot international qu’il a fait venir. Il veut même imposer le calendrier des compétitions en Afrique. Une CAN en Afrique tous les 4 ans, rien que ça. Maintenant qu’il a pris le contrôle plus besoin d’Ahmad Ahmad et son staff qui commence à manifester quelques velléités d’indépendance. Il les tient par la barbichette, et souvent par le chantage. Il suffit de sortir quelques images embarrassantes et il en a. Il le tient aussi par quelques contrats pas très orthodoxes, que le Malgache a passé à des sociétés qui lui sont proches. L’affaire est pliée. Il faut un nouveau Président plus arrangeant, plus obéissant, plus corvéable et peu regardant. Le football africain est sous coupe, réglée, la FIFA est aux commandes.

Giani Infantino  veut garder la CAF sous sa coupe. Il ne s’agit pas de défendre Ahmad Ahmad qui a été un outil de cette stratégie et qui ne peut se prévaloir de ses propres turpitudes. Il mérite presque ce qui lui arrive. Il n’était pas à la hauteur. Nos représentants à la CAF, ne sont pas exempts de tout reproche. Qui l’est d’ailleurs dans cet environnement ? Il y a de quoi s’insurger contre c’est cette propension du corrupteur occidental à toujours donner des leçons, à utiliser les Africains pour faire passer sa pilule. Pour qu’il y ait corruption, il faut un corrupteur et un corrompu. Dans le cas d’espèce, celui qui a corrompu pour placer Ahmad Ahmad on le connait. Ahmad est le produit de celui-là. Il est tout aussi condamnable qu’Ahmad et tous ceux contre qui la FIFA se déchaine aujourd’hui. Sans ces millions de dollars distribués, il n’aurait jamais été à cette place. Si la commission doit exclure Ahmad Ahmad, ce qui est normal, elle doit aussi frappé Giani Infantino, « pas de deux poids deux mesures ». Mais on sait qu’il est un trop gros morceau pour être inquiété. Personne n’ignore le grand nombre de plaintes qu’il traine devant les juridictions de son propre pays la Suisse. Et pourtant, cela ne vient à l’esprit de personne de le juger inapte à gérer l’instance faitière du football mondial. D’ailleurs, tous les patrons des Fédérations qui parlent de lui préfèrent le faire loin de leurs chambres d’hôtel, et toujours en off. Alors à quelques semaines de l’élection du futur Président de la CAF, il devient urgent pour les Africains de prendre conscience que cette Confédération n’est pas seulement un club d’incultes et de passionnés du ballon rond qui se tapent dans le dos et qui profitent des voyages en 1ère classe et des suites dans les grands hôtels de luxe avec des créatures de rêve aux frais de l’institution. C’est un outil de souveraineté, un de ces instruments miroirs de l’Afrique. Les stars africaines comme à l’époque Roger Milla, Samuel Eto’o, Didier Drogba, Abedi Pelé, Jay Jay Okocha et aujourd’hui Pierre-Emerick Aubameyang, Sadio Mané, Mohamed Salah, Toko Ekambi pour ne citer que ceux-là, sont-ils condamnés à ne briller que chez les autres, dans les championnats européens ? Ne sommes-nous pas capables de fournir autre chose que de la matière première ? Au 21e siècle, doit-on encore une fois, fournir la gestion de notre football à d’autres ? N’existe-t-il pas des compétences africaines pour développer ses talents pour rendre rentable cette extraordinaire manne ? Pourtant, l’Afrique regorge des compétences suffisantes pour gérer la CAF de façon optimale. Que les Africains comprennent qu’il y a pas mal d’argent en jeu, pas mal d’argent à générer à condition de gérer de façon orthodoxe et transparente. Il est donc urgent de s’y intéresser. Malheureusement, la prochaine élection de la CAF est déjà biaisée avec des candidats totalement acquis à la cause de la FIFA comme le Mauritanien Ahmed Yaya qui semble être le poulain de Giani Infantino au détriment du Sud-Africain Motshepe qu’il présentait à certains Chefs d’Etat comme son choix. Il y a lieu de s’inquiéter de la situation de la CAF qui est presque en cessation de paiements.

Au lendemain de l’élection qui se tiendra le 12 mars à Rabat ne risque-t-on pas de se retrouver avec les mêmes travers ? Quelle est l’urgence de voter avec ce climat délétère ?

Paul Essonne

Journaliste

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