Une équipe mixte composée des agents de l’antenne de la Police Judiciaire de Makokou, de la Direction Provinciale des Eaux et Forêts de l’Ogooué-Ivindo et de la Direction de la Lutte contre le Braconnage (DLCB) appuyée par l’ONG Conservation Justice viennent de procéder à l’interpellation d’une dame de nationalité gabonaise pour détention illégale d’espèces de faune sauvage.
Sans être manifestement consciente des dangers que cela représente, l’intéressée a été interpellée en possession d’un chimpanzé, le lundi 27 juin dernier à Koumameyong, dans la province de l’Ogooué-Ivindo. Elle détenait depuis 2 à 3 semaines ce chimpanzé aux yeux de tous, alors que cela constituait un risque sanitaire pour la communauté. L’accusée détenait également un cercopithèque Moustac appelé plus communément « queue rouge ».
Les faits constitutifs de capture et détention illégale d’une espèce intégralement protégée sont interdits par la loi afin de préserver ces espèces particulières et menacées. Outre le risque d’être interpellé, détenir chimpanzé constitue un risque de morsure grave sachant que ces animaux deviennent rapidement plus forts qu’un être humain et peuvent transmettre de graves maladies.
La détention des animaux sauvages en captivité soulève en effet un risque grave d’exposition à des maladies zoonotiques, c’est-à-dire transmises par les animaux. En préservant la faune sauvage dans son écosystème originel, la santé humaine est protégée des risques de pandémie comme Ebola, épidémie qui reste loin d’être maîtrisée en Afrique centrale. La tuberculose peut également être transmise à travers les singes. Et les épidémies de virus émergents liés aux zoonoses sont de plus en plus responsables de maladies, comme le coronavirus ou encore la variole du singe. L’organisation mondiale de la santé (OMS) a récemment déclaré près de 1 400 cas de variole de singe dans 7 pays d’Afrique.
« Au total, il s’agit de 1392 cas suspectés et 44 confirmés. Ce décompte concerne les cas enregistrés du début de l’année jusqu’à la mi-mai, et repose sur des rapports préliminaires. Les cas ont été signalés au Cameroun, en République centrafricaine (RCA), en République démocratique du Congo (RDC), au Libéria, au Nigéria, en République du Congo et en Sierra Leone. Le nombre de cas signalés en 2022 est légèrement inférieur à la moitié des cas enregistrés en 2021. » note le rapport de l’organisation mondiale de la santé.
La capture et la détention des espèces sauvages intégralement protégées comportent également des risques écologiques. Le Docteur Gaël Darren MAGANGA, virologue et enseignant chercheur qui codirige l’unité Émergence des maladies virales du Centre International de Recherches Médicales de Franceville (CIRMF) au Gabon, l’un des deux laboratoires « P4 », hautement sécurisé en Afrique, affirme avec onze autres écologues de la santé dans le monde que « la préservation de la biodiversité et de l’équilibre des écosystèmes constituent le meilleur antidote contre l’émergence de nouvelles maladies » rapporte Marie-Monique Robin, réalisatrice du documentaire « La Fabrique des pandémies ».
Cela devrait attirer plus de surveillance épidémiologique et surtout renforcer les moyens de dissuasion pour décourager les pratiques de capture et de détention d’espèces sauvages. Il est en tout cas capital que la population soit informée des risques et évite les contacts rapprochés avec les primates, qu’il s’agisse des petits singes (cercopithèques, cercocèbes, colobes, mandrills, mangabeys) ou des grands singes (chimpanzés, gorilles).