Tribune conjointe du Président de l’Union africaine : Macky Sall et du Président du Conseil européen : Charles Michel à l’occasion du Sommet UA-UE 2022.

Les 17 et 18 février prochains, les chefs d’État ou de gouvernement de l’Union africaine et de  l’Union européenne se réuniront en sommet à Bruxelles. Le dernier sommet UA-UE s’est tenu il y a  plus de quatre ans, en novembre 2017, à Abidjan. 

La pandémie est évidemment l’une des raisons qui expliquent le temps qui s’est écoulé depuis notre  dernière rencontre. Sa survenue renforce d’autant plus la dimension exceptionnelle que nous  voulons, de part et d’autre, donner à ce sommet. L’objectif n’est rien moins que d’établir ensemble  les bases d’un partenariat renouvelé entre nos deux continents, un nouvel élan dont l’idée est en  gestation depuis un certain temps déjà. La croissance, la prospérité partagée et la stabilité sont les  grands objectifs de ce partenariat. Notre sommet reposera sur deux principes fondateurs.

Respect et valeurs 

Nos deux continents et leurs peuples partagent une proximité géographique, des langues et des liens  humains et économiques. La paix et la sécurité de nos deux continents sont interdépendantes. Voilà  pourquoi le premier principe fondateur doit être le respect. Le futur nous demande d’accepter et de  respecter nos différences.

Le second principe fondateur, ce sont les droits et les valeurs que sont la dignité, la liberté et la  solidarité, exercés dans le cadre de l’état de droit et de la bonne gouvernance. Sur ce terrain  commun, nous pouvons chaque jour apprendre les uns des autres.

Enfin, notre projet repose sur des intérêts communs. Une Afrique prospère, stable, sûre et durable,  en pleine possession de ses moyens pour affronter tous les défis de l’avenir en est le cœur.

Un partenariat pour la prospérité 

Un partenariat postule l’échange et le partage. Chacun de nos deux continents dispose de possibilités  gigantesques à mettre au profit de ce projet commun.

L’UE apportera des capacités d’investissements publics et privés, ainsi qu’un savoir-faire en matière  d’infrastructures et de technologies vertes, qui sont essentielles pour notre combat commun contre le  changement climatique et la transformation des économies africaines.

L’Afrique dispose d’importantes ressources naturelles, d’une population jeune et dynamique qui ne  demande qu’à être mobilisée, et de capacités d’innovation et d’inventivité impressionnantes.

Elle a aussi besoin d’un meilleur accès aux ressources, y compris par la réallocation des droits de  tirage spéciaux sur une base volontaire, pour financer ses énormes besoins de développement  économique et social.

Dans le même esprit, une initiative pour l’allègement de la dette des pays pauvres est souhaitable  pour soutenir les efforts de résilience et de relance des pays africains.

Nous lançons également un appel en faveur d’une transition énergétique juste et équitable tenant  compte des besoins spécifiques de l’Afrique, notamment pour son industrialisation et l’accès  universel à l’électricité. Nous rappelons que plus de 600 millions d’Africains restent encore sans  accès à l’électricité.

Un partenariat pour la stabilité 

Notre partenariat renforcé mettra aussi la paix et la sécurité au cœur de ses priorités. Les menaces  sont de plus en plus transnationales et de plus en plus complexes. Nous y sommes tous confrontés,  quelles que soient leurs formes, y compris les cyberattaques et les attaques hybrides.

Ces menaces communes nous appellent à continuer à y faire face ensemble, y compris en Afrique,  en particulier dans la lutte contre le terrorisme.

Il nous faut poursuivre ensemble la réflexion, sous l’égide de l’Union africaine et de l’Union  européenne, pour une meilleure coordination de nos efforts dans cette lutte solidaire contre un  ennemi commun. Faire face à ce défi majeur requiert de partir des causes profondes, l’instabilité et  la radicalisation, pour aller jusqu’à la résolution durable des crises et à la construction d’une paix  réelle et durable.

L’épreuve de la pandémie 

La pandémie a mis en évidence nos vulnérabilités communes, notre interdépendance et donc la  nécessité d’agir ensemble et de façon concertée pour y faire face et mieux nous préparer aux  éventuelles crises sanitaires dans le futur. La lutte contre la COVID-19 reste une priorité immédiate.

L’Europe s’est investie depuis le début pour organiser et financer la solidarité internationale en  matière de vaccins, en particulier au travers de l’initiative COVAX. L’UE et ses États membres ont à  ce jour donné près de 400 millions de doses dans le monde entier, dont plus de 85 % via COVAX.

Avec près de 130 millions de doses livrées en l’Afrique, l’UE est l’un des plus grands donateurs sur  le continent. L’UE renforce aussi son soutien pour l’administration des doses, car avec  l’augmentation de l’approvisionnement, le plus grand défi sera la mise en place des plans vaccinaux.

Au-delà de la solidarité relative au don de vaccins, le défi que nous devons relever ensemble est  aussi celui de la production de vaccins et d’autres produits médicaux et pharmaceutiques en Afrique  pour satisfaire les besoins essentiels du continent. Nous saluons et soutenons les projets déjà en  cours sur le continent.

L’essentiel est d’adopter une approche concrète: identifier les obstacles, les freins aux livraisons, au  stockage et à l’administration des doses, et y remédier; ainsi que, bien sûr, accélérer la mise en place  des capacités locales de production des vaccins en Afrique, par l’Afrique et pour l’Afrique.

Enfin, nous sommes convaincus que la solidarité internationale en matière de pandémies et de  grandes crises sanitaires doit être organisée de manière globale, multisectorielle et inclusive. Nous  avons lancé et activement promu l’idée d’un traité international sur les pandémies. Ces efforts  conjoints des Européens et des Africains ont abouti à la décision récente de l’Assemblée mondiale  de la Santé d’ouvrir les négociations sur ce projet de traité, dont la conclusion est prévue pour mars  2024.

Un arc de paix 

Nous voyons grandir dans notre monde les risques de confrontation entre blocs. Face à cette tendance inquiétante, nous avons la conviction que l’Afrique et l’Europe peuvent travailler ensemble  à l’avènement d’un monde meilleur et plus sûr pour tous, en privilégiant le dialogue et la  coopération dans le respect mutuel.

C’est dans cet esprit et avec ces objectifs que nous nous apprêtons, Africains et Européens, à nous  retrousser les manches pour travailler à un avenir commun enthousiasmant.

Obone Flore

Journaliste

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