Le débat de Missélé eba’a: Edith Cresson du Gabon, dehors…(4/7)

Se targuer d’être la première femme à occuper un poste ne veut absolument rien dire dans un monde en pleine mutation. Il en faut plus pour que cette prétendue exception ait du sens.

Quand on parle de Margaret Thatcher, l’Angleterre, majoritairement, en est fier, tellement elle aura marqué son temps. Les anglais retiendront que c’est grâce à sa vision qu’ils ont pu avoir l’accès à la propriété. L’appellation « dame de fer » est née du fait de sa rigidité légitime, à cette époque, face à l’anticommunisme assumé.

Quand on parle d’Angela Merkel, première chancelière en Allemagne, c’est d’abord le fruit d’une reconnaissance de la femme stratège. Ensuite, le pied à l’étrier, ses choix économiques font de l’Allemagne le leader en Europe dans bien de domaines. C’est pourquoi, depuis 2006, elle est désignée comme étant la femme la plus puissante du monde par le magazine Forbes et elle est perçue comme la personnalité la plus puissante de l’Union européenne. C’est dire…

Même si elle fût contestée et très impopulaire, Edith Cresson sous François  Mitterrand avait quand même une historicité politique remarquable susceptible de lui fabriquer une légitimité au poste. En plus, sa présence à Matignon était le symbole de la reconnaissance en politique. En effet, en 1965, alors que François Mitterrand n’avait ni parti politique, ni grands moyens pour affronter le puissant général De Gaulle à la première élection présidentielle au suffrage universel, Édith Cresson, munie de son doctorat en démographie, s’était proposée de jouer la secrétaire de bureau pour accompagner le challenger de l’homme de la Libération de la France.

Comme disait Pierre Joxe, compagnon politique de François Mitterrand, ce dernier avait un grand respect et une admiration considérable pour tous ceux qui ont cru en lui alors qu’il n’était rien et pataugeait dans l’incertitude. Et dans cette short liste, le nom d’Édith Cresson y figurait en très bonne place.

Quid du profil de l’actuelle première ministre? Quels sont ses faits d’arme qui justifieraient objectivement sa présence à ce poste? On ne lui connaît aucune base politique, aucune histoire politique, aucun compagnon de lutte politique, aucune philosophie politique. On se souvient encore que sa légitimité à la mairie de Libreville fut sujet à caution. Elle n’avait pas été un artisan majeur de la victoire de sa liste aux élections locales. Et la place qu’elle occupait dans celle-ci ne légitimait pas son insolent parachutage à la tête de la première ville du pays. Véritable profil pousse-pousse.

Habituée à agir sous la dictée des mains noires ou des maîtres à penser, caractéristique de gens qui ne savent jamais rien assumer et sont bien conscients de leur imposture, c’est sous son magistère au ministère de la défense qu’a eu lieu l’opération scorpion dont la méthode et les conclusions ont été remises en cause par une commission de l’ONU. C’est étrangement à la veille d’un conseil municipal qui avait pour but de faire la lumière sur les comptes  de l’hôtel de ville que Léandre Nzue se retrouve trop vite jeté en prison.

C’est sous l’ère d’une primature en réanimation qu’une affaire rocambolesque de sacs d’argent vient salir tout un gouvernement voire tout un pays. Car, dans cette affaire, le ministre du pétrole n’a certainement pas encore lâché sa boule puante. Nul ne peut croire que quelqu’un se lèverait un matin pour corrompre une personne qui ne serait nullement à l’origine de votre nomination et dont vous ne prenez aucun appui dans son modeste espace d’influence. En plus, envoyer un intermédiaire avec autant d’argent pour une première aventure du genre, c’est assez grotesque pour toutes les personnes initiées ou avisées.

Que le président de la République ou ceux qui participent à la décision prennent la mesure du risque de ne pas engager un remaniement en profondeur comme cela tend à s’imposer. Le temps est plus que jamais compté. Guy Nzouba Ndama, Alexandre Barro Chambrier et Paulette Missambo auront déjà gagné 66% de leur combat si la primature continue d’être maintenue sous assistance respiratoire. Avec l’environnement international bouillant, aucune manœuvre risquée pouvant justifier une prétendue victoire en 2023 ou avant ne sera crédible si l’attelage en place demeure autant claudicant.

Paul Essonne

Journaliste

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