La crise gabonaise vue par Guy NANG-BEKALE.

A mon humble avis, au regard des douloureux événements que le peuple subit depuis 2016, il est temps et urgent que les gabonais se parlent. Ils sont tous conscients que leur pays est en train de s’effondrer et que malheureusement ils n’ont, au niveau national, aucun voie, aucun leader, aucune autorité pour prendre l’initiative de proposer une voie de sortie de cette imbroglio qui est fait de violence ; de colère, de haine et de honte.

L’autorité religieuse est malmenée, le Médiateur de la République est inopérant ou inexistant et le pouvoir Exécutif, incarné par un Président, Chef de l’Etat est totalement affaibli. Il est désormais détenu et exercé par les personnalités, les Institutions et les organismes qui lui sont hiérarchiquement et/ou formellement subordonnés ou soumis ; et qui ne sont pas qualifiés pour ce faire.

Indépendamment des appartenances et des chapelles politiques, les patriotes démocrates de tous bords ne doivent pas assister indifférents à l’assassinat des citoyens dans les conditions inacceptables, inadmissibles et cyniques comme c’est actuellement le cas à Libreville, Port-Gentil et dans d’autres Provinces ; voir nos compatriotes jeunes apprenants et adultes vivre en exil dans les conditions précaires et la crainte de se faire assassiner ou expulser pour des raisons diverses et variées ; laisser les Institutions de notre pays se scléroser et sombrer dans un immobilisme et une logique qui frôlent l’irresponsabilité et l’arrogance ; accepter que les autres peuples du monde parlent du Gabon avec mépris et insolence ; méconnaitre ou faire semblant d’ignorer le poids de la France dans les règlements des conflits politiques délicats au Gabon depuis 1960.

Je pense qu’il faut suspendre l’organisation de toutes formes d’élections au Gabon parce que les mentalités des autorités étatiques, en particulier celles qui sont responsables de la gestion des votes et de la sécurité des citoyens ne sont pas encore imprégnées de la notion d’impartialité, de protection et du respect des droits humains ; et parce que très peu de gabonais ne font plus confiance aux processus électoraux et aux résultats y relatifs. Il faut créer un « Cadre Institutionnel Exceptionnel : CIE) qui sera chargé des missions précises… Dans tous les pays du monde, sans exception, les élections subissent l’influence des puissances étrangères sous diverses formes.

Cette proposition de réforme institutionnelle doit partir des éléments politico-juridiques qui portent sur l’organisation, le déroulement, la proclamation et la crise post-électorale née de la dernière présidentielle de 2016 qui doit cesser d’être considérée et perçue comme un diviseur, mais comme une donnée autour de laquelle les sincères « fils » du Gabon doivent se rassembler pour débattre sans haine et passion des modalités d’une véritable refondation de la société gabonaise, dont le blocage actuel a pour fondement la tenace volonté des tenants du pouvoir à le conserver pour sécuriser leurs intérêts. La perspective de les perdre provoque chez certains les sentiments de peur et d’autodéfense qui se traduisent par le recours à une violente répression aveugle de la moindre action d’opposition ou critique.

Les révolutions populaires conduites autrefois par les ouvriers, les paysans et les pauvres sont difficiles à engager à notre époque où tous les « pays faibles », qui possèdent des richesses naturelles indispensables aux industries des « puissants pays occidentaux », sont sous surveillance par les meilleurs espions et agents de renseignements ; l’occupation militaire légalisée des territoires ; les satellites et autres moyens et instruments de domination, directe et indirecte. Il en est ainsi de tous les pays africains francophones anciennement colonisés et actuellement néo colonisés.

Ce rapport de forces très déséquilibré et très défavorable, sur tous les plans, aux Etats africains francophones, dont le Gabon, impose une profonde réflexion collective pour élaborer une stratégie concertée pour réformer les relations entre le Gabon et la France. Non point sous le signe de la Réconciliation ou de la transition, mais sous celui d’un « consensus », qui certes ne sera pas facile à faire accepter à tous (l’unanimité n’est pas de ce monde) mais qui est présentement la seule voie pour désamorcer la bombe qui gît dans le pays et le menace de déflagration meurtrière.

Même si les gouvernants du pouvoir PDG-Emergents ne peuvent pas l’avouer, la réalité est qu’ils n’ont pas suffisamment de personnels cadres : politiques, économistes, financiers, diplomates, juristes et autres qualifiés, capables de conduire une politique de développement et de relation internationale, faite de partenariats vertueux et mise au service des populations gabonaises. De plus, l’image de ce pouvoir est tellement ternie, salie et honnie qu’il n’inspire plus confiance aux populations et ne peut plus rien entreprendre de satisfaisant pour elles.

Guy NANG-BEKALE, Dr d’Etat en Sciences Politiques

Paul Essonne

Journaliste

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