La Chicha, une tueuse silencieuse par Serge Abslo

J’étais tout dernièrement  avec des collègues dans un coin très couru des jeunes «grooveurs », dans le quartier Louis, réputé être le Las Vegas de Libreville. Et de là où j’étais assis, j’ai pu observer  des jeunes gabonais fumer de la chicha, cette pipe à eau devenue un must des soirées mondaines librevilloises.

Je n’ai pas pu m’empêcher de m’interroger comment cette pratique pourtant très éloignée de notre culture est devenue si répandue dans les mœurs de nos jeunes? Comment est venue à nous la chicha et pourquoi notre jeunesse s’y adonne-t-elle avec autant de passion?

Certains fument pour échapper à l’addiction au tabac, d’autres par effet de mode, certains autres par croyance que la chicha serait moins addictive et toxique que la cigarette et quelques uns par pure convivialité entre amis d’avoir une belle expérience sensorielle autour d’un bel objet.

Cependant, les effets des pipes à eau ont fait l’objet d’études cliniques qui indiquent que leur utilisation est aussi nocive, sinon plus que la cigarette. En dépit de leur préparation et leur mode de consommation différents, les tabacs pour pipe à eau contiennent des substances nocives similaires à celles contenues dans les cigarettes, en plus grande quantité.

Ces substances sont connues pour induire un stress oxydatif et une inflammation, principaux mécanismes sous-jacents d’un large éventail de pathologies chroniques. En effet, la fumée de la chicha favorise 1) le cancer du poumon et 2) les maladies cardiovasculaires. Elle contient aussi de la nicotine  qui est très addictive.

Le taux de nicotine d’un fumeur de chicha équivaut à 2 à 3 cigarettes fumées. Une chicha expose le fumeur à une quantité de fumée plus grande que les fumeurs de cigarettes. Si une cigarette est fumée en 5 à 7 minutes, en inhalant 0,5 à 0,6 litre de fumée, une chicha dure 20 à 80 minutes avec inhalation de 50 à 200 bouffées de 0,05 à 0,25 litres, soit un volume de fumée de plus de 100 cigarettes par session.

Par ailleurs, la chicha génère une quantité importante de gaz, de métaux, d’arsenic et de produits chimiques cancérogènes et mutagènes. Une séance de 45 minutes délivre 20 fois plus de goudron, 2 fois plus de monoxyde de carbone, et 3 fois plus de nicotine qu’une cigarette. Si 30 à 50 bouffées sont prises dans la même soirée par chicha, le consommateur prend autant de fumée qu’avec 40 cigarettes.

Des mesures montrent que l’augmentation du monoxyde de carbone expiré à la fin d’une chicha est équivalente à celle de la consommation de 30 à 40 cigarettes. Le tabac de la chicha et peut être son charbon de bois,  sont aussi une source chronique de toxicité avec le cadmium, le plomb et le thallium.

Enfin, le passage du tuyau d’une bouche à l’autre favorise également la transmission de maladies contagieuses, comme l’herpès, la tuberculose, l’hépatite ou encore la COVID-19. L’usage d’un embout individuel jetable permet de réduire ces risques sans les éliminer.

Après avoir fumé pendant 26 ans, Dieu m’a fait la grâce de me défaire de l’addiction au tabac et j’essaie aujourd’hui de détourner les jeunes de toute forme de tabacologie. La chicha n’est pas un simple effet de mode, c’est une tueuse silencieuse et vicieuse.

*À tous les jeunes, je vous en conjure! Laissez cette saleté!*

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