Gabon/Lutte contre la vie chère : La nouvelle mercuriale ne va rien changer.

Le gouvernement prévoit de lancer la nouvelle mercuriale pour alléger le panier de la ménagère au Gabon, comme si c’était la première fois qu’il essayait de revoir les prix des produits de première nécessité. Pourquoi détaxer les produits importés au détriment des produits locaux ?

Cette baisse des prix est un artifice de trois mois au plus six mois, avant de voir le prix de ses produits grimper sous le regard impuissant des mêmes autorités. Un  rappel nous permet d’observer l’évolution de l’augmentation des prix, et de voir aussi, le laxisme de certaines institutions en charge de lutter contre la vie chère au Gabon.

En 2008, la situation de la vie chère préoccupait déjà les Gabonais. Le prix variait au jour le jour avec le kilo de ragoût qui s’élevait à 3000 francs CFA. L’association ‘’Cri de femmes’’ et la coalition contre la vie chère avaient contesté cela à l’approche des élections présidentielles.

En 2014, soit six ans après, il y a eu une nouvelle flambée des prix où Libreville la capitale gabonaise était passé du 30ème au 14e rang mondial des villes les plus chères, selon une étude menée et rendue publique par le cabinet ECA International.

Puis il y a eu 2015, au lendemain de l’augmentation des salaires, avec l’entrée en vigueur du nouveau système de rémunération. La question d’une hausse généralisée des prix avait fait place à la psychose. Une augmentation de trop pour la population, que dire des commerçants en gros, des opérateurs économiques qui ont bénéficié entre 2012 et 2013 (et c’est d’ailleurs le cas jusqu’à présent), d’une exonération de taxes sur 166 produits de première nécessité.

L’espoir en 2016 mais elle n’aura été que de courte durée. Le conseil des ministres du 3 juin de l’année en cours a adopté les mesures urgentes avec l’annulation de plusieurs taxes et en renonçant de percevoir d’autres à travers : La création d’un Comité Interministériel de Suivi Permanent de Lutte contre la Vie Chère placé sous l’autorité du Premier Ministre, avec la participation des associations des consommateurs, des commerçants, des transporteurs et des producteurs ; la mise en place d’une brigade mixte pour le contrôle et la surveillance des prix des produits ; la suppression et baisse de certaines taxes relevées par les administrations au Port :– baisse de la Redevance d’Utilisation du Système Informatique de la Douane (RUSID) de 3 % à 1,5 % de la valeur de la marchandise ;– suppression des frais relatifs aux Autorisations de Mise à Consommation (AMC) et de Mise sur le Marché (AMM) de la Direction Générale de la Consommation et de la Concurrence en abrégé « DGCC » (25.000 par conteneur) ainsi que les frais d’inspection (5 francs CFA le kilogramme) ;– baisse de 4 % les droits de trafic prélevés par le Conseil Gabonais des Chargeurs en abrégé « CGC » (1.968 francs CFA la tonne plus 30.858 francs CFA le conteneur) ;– suppression des frais relatifs à l’Attestation Sanitaire de Mise sur le Marché (ASMM) de l’Agence Gabonaise de la Sécurité Alimentaire (AGASA) ;– suppression des frais relatifs à la demande de formulaires d’importation de l’AGASA ;– baisse de 50 % de frais relatifs au Certificat Sanitaire Vétérinaire à l’Importation (CSVI) ; la baisse des tarifs portuaires des opérateurs privés après concertation avec ces derniers ; l’organisation dans chaque province avant la fin du mois de Juin 2016, des Comités Provinciaux ; la révision des tarifs de transport afin de tenir compte des distances effectuées ; l’obligation de débarquement du poisson dans les pêcheries artisanales maritimes de Libreville et d’Owendo.

En 2017, les prix de quelque 167 produits cette fois-ci concernés devaient immédiatement connaître une baisse conséquente pendant une durée de six mois. Pour cela, 15 jours avaient été consacrés à l’affichage des prix qui a été immédiatement suivi de la phase répressive, cela était même visible chez les grossistes et détaillants. Mais malheureusement cette baisse n’a pas été applicable.

Aujourd’hui en 2022 c’est pire. Le Gabonais essaye de tenir, y parviendra-t-il ? Le ministre de l’Économie et de la Relance, Nicole Jeanine Lydie Roboty, qui disait que le prix du pain n’allait jamais connaître une augmentation et s’est rendu compte par exemple que la baguette est maintenant à 150 francs CFA et l’œuf coûte désormais 150 francs CFA, que dire du litre d’huile pourtant fabriqué au Gabon fixé à 1600 francs CFA. Les coups de dinde qui valaient 900 francs CFA le kilo sont aujourd’hui à 1500 francs CFA, idem pour les croupions, les pattes de poules, les cuisses molles. Le kilo de sucre de SUCAF qui était à 750 francs CFA est désormais à 1000 francs CFA. On a vraiment l’impression que rien ne se fait pour soulager un tant soit peu le panier de la ménagère. Avec cette rétrospective qui nous emmène à la conclusion suivante : rien ne va changer tant que l’on ne poussera pas les Gabonais et les Gabonaises vers un véritable retour à la terre avec des moyens adéquats. Car, il faut injecter de l’argent via des remboursements à court, long et moyen terme en tenant compte des besoins des consommateurs.

Pour protéger le panier de la ménagère contre le taux d’inflation, l’analyste Mays Mouissi revient sur les établissements bancaires « En Afrique centrale dans l’espace CEMAC, et en Afrique de l’Ouest dans l’espace UOMOA, les banques centrales sont construites sur le modèle de l’ancienne Banque de France et aujourd’hui de la banque centrale Européenne. En outre, l’une des missions principales de la banque centrale de l’Afrique de l’Ouest et de la banque des Etats de l’Afrique Centrale (BEAC) est de lutter contre l’inflation. Au niveau de la CEMAC, il faut voir le levier dont dispose la BEAC et ainsi produire plus localement ».

En clair, il faut financer les politiques sociales pour prétendre lutter contre la vie chère au Gabon.

 

Paul Essonne

Journaliste

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *