Gabon : la Fonction Publique perd un peu plus de son attrait.

Il n’est pas normal qu’une majorité de la population active soit fonctionnaire. C’est encore moins normal que les fonctionnaires gabonais, aujourd’hui, soient mal payés et qu’en gros, l’employeur : l’Etat, soit un mauvais employeur. Il ne les choisit pas, il ne les affecte pas comme ils veulent, donc il faut aujourd’hui, avec les fonctionnaires, moderniser la Fonction publique.

Avec de tels propos, des mouvements sociaux sont à craindre. Rappelons que dans le langage courant, le mot fonctionnaire désigne l’ensemble du personnel de l’administration. Mais les fonctionnaires ne représentent qu’une partie des agents de l’administration. Sont aussi employés des agents publics titulaires (fonctionnaires et autres catégories) et des agents non titulaires (auxiliaires, agents contractuels, vacataires).

En effet, les fonctionnaires gabonais ont perdu leur situation privilégiée en termes de position sociale et de conditions d’emploi. De ce fait, les jeunes diplômés ne sont généralement pas intéressés par la perspective de travailler pour l’État. L’attrait du secteur privé, notamment pour le personnel hautement qualifié, contribuerait à le détourner des emplois publics. Quelle que soit la validité de ces extrapolations statistiques qui n’a pas à être discutée ici, l’accent est mis sur les avantages matériels en tant qu’ils détermineraient les préférences professionnelles. Sans aller jusqu’à invoquer la « vocation », entendue comme service d’une cause, le choix d’une carrière dans le secteur tant privé que public peut répondre à des motivations plus complexes, mêlant le désir de servir ou d’être socialement utile et les bénéfices, notamment symboliques, qui s’attachent à l’exercice des professions concernées. Par ailleurs, le rapport qu’entretiennent les individus aux univers professionnels qui leur sont ouverts est largement conditionné par des représentations sociales, variant selon les époques, qui valorisent tel type d’activité au détriment de tel autre.

Or, depuis quelques années, l’État-providence est mis en question, le rôle de la puissance publique, le périmètre de son action font l’objet d’une réévaluation critique ; la taille de l’administration, son organisation, son coût rapporté aux services effectivement rendus et les règles applicables à la fonction publique sont au centre de débats alimentant les projets de réforme inspirés par les théories de la « nouvelle gestion publique ».

L’État devait cesser d’être un acteur dominant et que nombre de ses activités de service public pourraient être assurées plus efficacement et à moindre coût par le secteur privé marchand ou associatif.

Or, si l’on regarde de près le socle de valeurs sur lequel s’est construite l’action publique, et que l’on examine le sens assigné par la jurisprudence administrative aux notions canoniques qu’elle a forgées, on constate que le service public et l’intérêt général n’ont jamais eu un contenu statique. Bien au contraire, ils ont au cours du temps fait l’objet d’interprétations et d’ajustements constants en vue d’adapter le droit à l’évolution de la société et, partant, d’adapter les modalités de l’action publique. La question, posée une fois de plus actuellement, porte précisément sur ce que recouvrent ces termes et non pas sur les termes eux-mêmes.

Pourtant, qu’il s’agisse des règles applicables aux fonctionnaires, de celles qui transforment l’usager en client, des modes de gestion administrative, etc., l’État ne peut conserver sa légitimité qu’à condition que les finalités de son action, quels qu’en soient les instruments, demeurent irréductibles à celles poursuivies par tout autre acteur social. Ce qui implique de procéder à la redéfinition du rôle de l’État, de son périmètre d’action, des acteurs participant à l’élaboration et à la mise en œuvre des politiques publiques et de donner un contenu concret aux principes qui font de l’État le garant du lien social.

Aussi, les fonctionnaires de l’Etat devront acquérir une culture d’assistance et de conseil. Ce n’est pas nécessairement les normes qu’il faut changer, mais leur mode d’application.

Serge Kevin Biyoghe

Rédacteur en Chef, Journaliste-Ecrivain, Sociétaire de la SCAM (Société Civile des Auteurs Multimédias), membre de la SGDL (Société des Gens De Lettres), membre du SFCC (Syndicat Français de la Critique de Cinéma), membre de l'UDEG (Union Des Écrivains Gabonais).

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