Chaque année, pour des raisons d’études universitaires, les étudiants gabonais effectuent des voyages au Sénégal. Tout ne se passe pas comme prévu pour tous les étudiants : il peut y avoir des dérapages, des accidents. C’est le cas de la situation des étudiants gabonais qui se retrouvent en milieu carcéral. Les faits sont relatés ici par un compatriote activiste gabonais vivant en France, qui a posté une vidéo :
« Dans la nuit du mercredi 20 mai au jeudi 21 mai 2020, quatorze étudiants ont été interpellés dont 13 ayant un passeport gabonais, un […] la nationalité sénégalaise et ayant grandi au Gabon, promotion 2017-2018 au Sénégal pour les études. Ils sont incarcérés à Dakar. Parmi les étudiants, il y a ceux qui suivent une formation dans les filières d’Informatique et de Génie Civile, qui sont en dernière année d’études de master 2. L’on note 8 garçons et 6 filles, dont 3 personnes de la même famille (2 sœurs et 1 frère). Les étudiants n’ont jamais été au contact de la justice au Gabon.
En effet, il y a l’état d’urgence au Sénégal depuis le mois de mars à cause de la pandémie du Covid-19. Cet état d’urgence fait qu’aujourd’hui il y a interdiction de rassemblement, toutes les mesures restrictives que l’on connait, couvre-feu etc…, même les rassemblements religieux sont interdits.
Ils ont été interpellés parce qu’ils étaient 14 dans une pièce (appartement). En fait, c’est le voisin récalcitrant qui a alerté la police. […] Vers minuit, la police a débarqué et a embarqué tout le monde.
La suite est plus compliquée. On va les placer dans le wakan (brigade de gendarmeries) les filles seront dans une même cellule, les garçons dans une autre cellule. On ne leur donne pas à manger. Ce sont les amis à l’extérieur qui s’organisent pour leur apporter à manger. Sachez qu’on est en période de Ramadan au Sénégal.
On a enlevé les sous-vêtements aux filles. Donc elles sont habillés sans sous-vêtements, ni soutiens. Pourquoi ? Personne ne comprend cette situation. Imaginez un peu les conditions d’hygiène depuis mercredi. Les garçons sont en slip uniquement. Tous dorment à même le sol.
Le Sénégal est un pays ami du Gabon, ils ont une histoire commune. Ce qui veut dire que nous pouvons interpeller les autorités sénégalaises pour gérer au mieux cette situation.
De mercredi jusqu’à vendredi, les associations et les étudiants se sont mobilisés devant cette brigade de gendarmerie. Les autorités consulaires n’ont fait aucun cas. Bien au contraire, quand elles sont sollicités, l’ambassadeur du Gabon au Sénégal Régis Onanga Mamadou Ndiaye ainsi que tout son personnel diplomatique, […] répondent ceci aux proches et aux autres étudiants qui les sollicitent « On en a marre de traiter les cas des étudiants. On ne veut plus, ça nous fatigue. »
Qu’est-ce-que c’est cette manière de réagir ? Quelles sont vos missions ? Et […] j’interpelle les autorités des affaires étrangères. Quand ces personnes parlent de la sorte, cela veut dire qu’il faut les homologuer et il faut aller plus loin si possible. Elles ne peuvent pas abandonner les Gabonais à l’étranger quel que soit ce qu’on leur reproche. C’est une interpellation, ils n’ont pas encore été jugés coupables. Il n’y a pas de procès. Vous devez les assister, c’est votre mission principale. Mais comment pouvez-vous dire […] cela aux proches ?
En plus de mercredi, il n’y a que vendredi que l’ambassadeur se déplace à la brigade avant le déferrement au tribunal devant le procureur. Qu’est-ce qu’il va faire ? Je suis […] ici parce qu’il y a le parent d’un des enfants qui m’a sollicité pour rentrer au Gabon. Donc, je suis seulement […] à cet endroit pour lui, je ne suis pas […] en ce lieu pour gérer vos affaires. Vous vous rendez compte. Le pire est qu’il n’arrive pas à obtenir ce qu’il est venu faire parce qu’il y a un autre personnel diplomatique qui était […] présent aussi pour faire les mêmes négociations. Ils n’ont rien réussi à faire.
On a déféré les étudiants devant le procureur, on leur a pris leur téléphone. On ne sait pas dans quelles conditions […] cela s’est passé. Les autres ont essayé de suivre jusqu’au tribunal. Un fois sur place, on les empêche d’entrer. Ils ont attendu dehors de 14 heures à 18 heures. A 18 heures, on leur dit : restez chez vous, le procureur a déjà fait son travail. Et c’est pour apprendre que ces gens ont été placés dans des centres de rétention aménagés. Donc, ils sont dans des cellules aménagées et non dans la prison centrale de Dakar. Mais ce qu’on sait aujourd’hui, c’est qu’il y a un hôpital Aristide Dantec à Dakar qui a été emménagé avec des cellules et c’est là-bas qu’on a mis les filles. Et les garçons sont au Cap Manuel derrière le palais de justice de Dakar.
Pour finir, j’aimerais dire ceci : c’est la mission des autorités consulaires de protéger les étudiants qu’ils soient coupables, présumés coupables, interpellés. Il arrive que quelqu’un soit contrevenant dans le pays où il l’est. […] Cela arrive. Les étudiants ont comparu sans avocats.››
Cette position inconfortable où l’on voit des étudiants gabonais au Sénégal être placés en cellules de prison interpelle d’un côté le président gabonais Ali Bongo, et de l’autre le président sénégalais Macky Sall qui doivent se hâter de mettre en place des discussions, dans le but d’apporter une voie de sortie immédiate. Car l’inquiétude gagne les familles restées au Gabon. Et d’ailleurs l’on ne pourrait comprendre ce silence étant donné le comportement d’internationaliste d’Ali Bongo et l’esprit d’ouverture accompagnée de combativité que possède Macky Sall.