La délégation de l’association culturelle regroupant des filles et fils fang de l’Estuaire, dénommée Mekê Me Nkoma a été reçue ce mardi 13 octobre 2020 à l’Assemblée Nationale par la Commission chargée de la légalisation du mariage coutumier en République Gabonaise. Cette délégation conduite par son Coordonnateur Général Jean-Claude OBIANG MBA était composée du Coordonnateur Général Adjoint ; du Secrétaire Général ; des 1er et 2ème vices président de la Commission culturelle ; de la commission des affaires Juridiques et du notable Prosper NGUEMA OBIANG.

Au centre de cette audition, la Commission ad hoc chargée du projet de loi sur la légalisation du mariage coutumier, présidée par l’honorable Henri BEKA- BA-KPWE et son Vice-président, l’honorable Hilaire MACHIMA, a requis l’appréciation de l’association Mekê Me Nkoma sur le bien-fondé et l’intérêt de cette légalisation, y compris sur les formes et les effets du mariage coutumier.
L’association culturelle Mekê Me Nkoma qui estime à juste titre que la légalisation du mariage coutumier n’est que justice, a bien voulu présenter son point de vue sur la question à la Représentation Nationale.
La coutume, en tant que source du droit, influence fortement la sphère juridique moderne de notre pays.
Du point de vue social, il est incontestablement observé dans les Etats Africains en général, et au Gabon en particulier, que plus de 80% des personnes qui envisagent de se marier, le font a priori à la coutume. Ce qui implique qu’une telle attitude soit inscrite dans la moralité et la mentalité de la société gabonaise, en rapport avec ses us et coutumes.
Enfin, la loi qui a longtemps méconnu le statut d’une personne mariée à la coutume, a laissé libre cours à plusieurs déviances et à la spoliation des veuves et des orphelins à la suite du décès du mari par la famille du défunt.
Au regard de toutes ces raisons, l’association Mekê Me Nkoma voit dans la légalisation du mariage coutume une consécration légale basée toute à la fois sur la légitimité même du mariage coutumier et sur la sécurisation de la veuve et de l’orphelin, voir de la famille toute entière, socle de la société.

Les interventions pertinentes et enrichissantes de messieurs Alphonse NTOUTOUME BEKALE, 2ème Vice-président de la Commission Culturelle de l’association Mekê Me Nkoma et du notable Prosper NGUEMA OBIANG, membre de la commission culturelle ont permis à l’association Mekê Me Nkoma de donner son point de vue sur les inquiétudes et les questions des honorables Députés. En effet, l’association Mekê Me Nkoma estime à quelques différences près que le mariage civil et le mariage coutumier doivent avoir la même force juridique. Dans la tradition, le mariage coutumier produit déjà des effets, il suffit donc de traduire ces effets en droit.
Sur la problématique de la dot, mekê Me Nkoma rappelle que c’est la dot qui crée la patrilinéaire et l’appartenance de la mariée au clan du mari. Cette dot est constituée en argent et en matériel, et revêt tout à la fois un aspect physique et spirituel. La consécration faite à ces éléments lie la femme à son mari et au clan de ce dernier.
Sur le plafonnement de la dot, l’association Mekê Me Nkoma estime que celle-ci ne devrait pas être plafonnée lorsque la durée du concubinage est raisonnable (5 ans maximum). Au-delà de cette limité, la dot doit être plafonnée afin de limiter les relations de concubinage.
Pour clore la problématique sur la dot, Mekê Me Nkoma propose en cas de séparation des conjoints (divorce ou décès) que la dot soit remboursée symboliquement. Une façon traditionnelle d’officialiser la séparation et libérer la femme qui peut refaire sa vie ou empêcher la veuve d’une seconde noce avec un membre de la famille de son défunt mari pour la continuité de la lignée en vue de la sauvegarde de la famille.
S’agissant de la légitimité du mariage coutumier, Mekê Me Nkoma rappelle que ce sont les parents qui marient leurs enfants à la coutume, ce qui est différent du mariage civil. Aussi, un procès-verbal signé des deux familles et authentifier par l’autorité coutumière ou le chef de quartier viendrait certifier ledit mariage. Et, c’est sur la base de ce procès-verbal que sera établi l’acte de mariage coutumier à l’exemple du certificat d’accouchement et l’acte de naissance.
En sus, Monsieur Alphonse NTOUTOUME BEKALE, a précisé que le régime matrimonial du mariage coutume est d’office celui de la polygamie. Toutefois, le caractère d’office de ce régime matrimonial n’implique pas forcément que le futur marié doit prendre une deuxième ou plusieurs autres femmes, mais correspond simplement à l’idéologie traditionnelle, qui fait de cette union un mariage ouvert a renchéri le notable Prosper NGUEMA OBIANG. Ainsi, une personne ayant déjà contracté un mariage civil sous le régime de la monogamie, mais voulant encore se marier à la coutume avec une autre femme, serait tenue au préalable de changer le régime matrimonial de son mariage civil devant les autorités compétentes.
Quant à la problématique sur l’effet rétroactif du mariage coutumier celle-ci demeure toujours, au regard de l’absence d’éléments tangibles susceptibles de prouver que le mariage a bel et bien eu lieu par le passé.
Les honorables Députés n’ont pas manqué de féliciter le Coordinateur Général Monsieur Jean-Claude OBIANG MBA, et toute sa délégation, sur la préservation et la valorisation de l’identité Fang de l’Estuaire et de toute sa culture.
Pour sa part, le Président de la Commission des lois, l’honorable Gabriel MALONGA a marqué son satisfécit quant aux éclaircis apportés par l’association Mekê Me Nkoma pour la formalisation d’une telle union dans un texte de loi.
Ces échanges aussi bien interactifs que productifs, de plus d’une heure d’horloge, n’ont pas laissé la Représentation Nationale insensible, qui a entendu faire de l’association Mekê Me Nkoma, son porte-parole auprès des communautés locales pour relayer et expliquer aux populations tout l’intérêt de cette loi.

