Une leçon d’économie avec Raymond Ndong Sima pour une sortie de crise sanitaire de l’Afrique.

La croissance en Afrique a été touchée de plein fouet par la pandémie de coronavirus et devrait se rétracter fortement entre 2019 et 2020, passant de 2,4 % à  -5,1 %, plongeant le continent dans sa première récession depuis plus de 25 ans. L’économiste et ancien Premier ministre gabonais Raymond Ndong Sima a donné sa recette dans l’émission L’entretien de Gabon24 :

« Je crois que tous les pays africains ont été surpris par la pandémie qui s’est rependue assez rapidement. La quasi-totalité des pays s’est montré réactif en prenant assez vite des mesures de sécurité individuelle et en adoptant des programmes de recommandation sur les mesures de distanciation entre les personnes de manière à limiter la propagation de la maladie, en allant même jusqu’à une mesure généralisée qui a été le confinement des populations malgré l’impact que ça avait sur le fonctionnement de leurs appareils économiques. Donc globalement pour moi, les pays africains ont plutôt bien réagit.

Je crois qu’il faut qu’on fasse une distinction entre les pays africains. Nous n’avons pas que le problème du Covid-19, nous avons eu en même temps une dégradation très forte du prix du baril de pétrole qui est venu se couplé à un problème sanitaire. Globalement, avant l’arrivée de la Covid-19 et du choc pétrolier, les économies africaines étaient plutôt caractérisées par des croissances assez fortes. Certains pays en tout cas avaient des croissances relativement soutenues. L’ensemble des pays pétroliers où les exportations de pétroles représentent les ¾ de leurs économies a été impacté. Ensuite, on ajoute la fermeture des activités économiques qui a entraîné le ralentissement considérable de la production dans une fourchette de 20 à 30% des activités. Et ce ralentissement se ressent au niveau des aéroports, des hôtels, de toutes activités. Donc, même les pays d’Afrique de l’Ouest comme le Sénégal, la Côte-d’Ivoire qui ne sont pas pétroliers souffrent également de façon significative du ralentissement de l’activité et de la fermeture des usines et des unités de production.

En effet, ce n’est pas seulement l’Afrique qui va se réinventée, c’est le monde entier. Car l’économie reposait depuis la fin de la 2e guerre mondiale sur le commerce international avant de s’orienter vers la mondialisation. Or le commerce international reposait sur l’ouverture absolue des frontières, c’est pourquoi depuis des années tous ces fameux programmes d’ajustement auxquels nous avons été soumis, le monde entier a procédé au démantèlement des barrières notamment barrières douanières, mais qui dit barrières douanières dit accélération des échanges entre les pays. Dès lors que nous avons une épidémie qui survient, un certain nombre de choses viennent en surface. Je vous donne un exemple, la règle qui prévalait était la règle de la rentabilité. Mais vous voyez bien que du fait des problèmes sanitaires qui sont survenus, il va bien falloir que dans les pays on prend la décision de produire même lorsque les produits ne sont pas rentables.

La façon dont on va aborder les économies va changer. De mon point de vue, il va falloir définir des produits de base qui relèvent de la sécurité des pays, qu’il va falloir produire, qu’ils soient rentables ou pas, parce que lorsque les épidémies vont continuer à venir, et les épidémies ne vont pas s’arrêter de se produire, il va bien falloir que localement on dispose d’une capacité de réaction permettant de faire face à cela. Je pense que la production va s’organiser, va se penser différemment.

C’est évident que la pandémie qui sévit actuellement va être une occasion de se repenser pour le futur, et peut-être une occasion de rattraper des retards. Il va bien falloir que les plans d’investissement que nous avons, nous mettent à niveau par rapport à ce que le reste du monde va faire parce qu’il y a des choses que nous ne pourrons pas continuer à faire. Je pense que beaucoup de Chefs d’Etat à l’heure actuelle sont en train de repenser ou de réorienter la façon dont ils vont envisagés les investissements de base, les plus importants. »

Aussi, une sortie de crise réussie, telle qu’elle est attendue par la population, nécessite de passer du mode catastrophe sanitaire à un processus de gestion de risques à moyen terme dans lequel doit être affirmé le rôle de coordinateur de l’État, tant dans la détermination des priorités de santé publique que dans la promotion de normes facilitant l’interopérabilité des technologies employées ici et ailleurs pour combattre la pandémie et pour promouvoir, autant que possible, la relance économique.

Serge Kevin Biyoghe

Rédacteur en Chef, Journaliste-Ecrivain, Sociétaire de la SCAM (Société Civile des Auteurs Multimédias), membre de la SGDL (Société des Gens De Lettres), membre du SFCC (Syndicat Français de la Critique de Cinéma), membre de l'UDEG (Union Des Écrivains Gabonais).

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