Certaines situations résistent in fine à l’application du code juridique et à la figure de délinquance derrière l’infraction de détournement des deniers publics c’est-à-dire les deniers appartenant aux organismes publics (Etat, collectivités locales, Etablissements publics). Le moment clé où un changement de rationalité et un véritable tri s’opèrent a visiblement lieu au sein de la composante police-justice.
Aussi, le principal obstacle pour enquêter sur le détournement des deniers publics est la preuve de l’infraction préalable. Car il est parfois difficile de lier une transaction financière douteuse à une infraction préalable, requise pour qu’il y ait détournement.
En effet, l’article 84 de la loi organique n°11/94 relative à la Cour des comptes au Gabon affirme que la reddition des comptes au Juge financier et évoquent les poursuites répressives encourues. Autrement dit, le Juge financier et le Juge répressif partage les compétences de surveillance de la gestion des Finances publiques selon que l’infraction soit financière ou pénale. A priori, il semble que le Juge financier devrait intervenir avant le Juge répressif.
Par ailleurs, les dispositions cumulées des articles 96 et 106 de la loi organique sur la Cour des comptes et 16 du décret n°110 fixant le régime de responsabilité des Comptables publics prescrivent une intervention préalable du Juge financier, spécialiste en la matière, avec la possibilité de déférer au Juge répressif les infractions qui relèvent de sa compétence.
Pourtant les opérations de l’organisme public, contenues dans le budget voté par l’organe délibérant, sont exécutées en deux phases (la phase administrative et la phase comptable), par deux agents habilités (l’Ordonnateur et le Comptable public) et selon les principes de la Comptabilité publique (1. Séparation des Ordonnateurs et des Comptables ; 2. Responsabilité des Comptables publics ; 3. Unicité de Trésorerie). Ainsi, les infractions financières réprimées par le Juge financier sont principalement, la faute de gestion et la gestion de fait pour l’Ordonnateur et le manque de diligence dans le recouvrement d’une créance ou le paiement irrégulier pour le Comptable public.
Cependant, les sanctions essentiellement financières (amende et débet) sont répertoriées dans l’article 141 de la loi organique n°11/94 du 17 septembre 1994 relative à la Cour des comptes. On peut aisément observer que le détournement des deniers publics n’y figure pas.
A ce jour, il n’existe presque pas de dispositions semblables qui permettent au Juge répressif de faire attentions aux infractions financières et de transférer le dossier à la Juridiction financière. On a vu plusieurs fois le Juge répressif emprisonner des Ordonnateurs pour des fautes de gestion, violant ainsi les prescriptions de la Constitution et des lois organiques (notamment au Tribunal de Franceville).
Le manque de transparence en matière d’illégalismes économiques et financiers des élites dirigeantes n’est pas forcément là où il est supposé être.