Le débat de Missélé eba’a : Pour 2023, l’opposition part favorite.

Le fameux Congrès du Parti Démocratique Gabonais (PDG) pompeusement dit de la Renaissance aura finalement accouché d’une souris. Sinon, qu’est ce qui a changé dans ce parti, dans sa forme comme dans son fond, pour que l’on puisse parler de Renaissance ?

Est-ce le fait de consacrer des impostures, cette collection de jeunes gens, nouvellement arrivés dans le parti légitimiste d’Omar Bongo Ondimba, sans expérience et sans base politique, que certains se permettent de parler de Renaissance ?

Ceux qui ont décidé de consacrer ces nominations fantaisistes comprendront qu’à la veille d’une élection présidentielle, il faut respecter et considérer l’activisme ou les états de service des militants doués et motivés.

La Renaissance dont il serait question ici est-ce le fait d’avoir tenté de masquer la main mise de Noureddine Bongo Valentin sur « le nouvel » organigramme des instances du parti ? Lorsqu’on voit au gouvernement, Daouda Mouguiama, Lee White, Guy Patrick etc, le Gabon étant une maison de verres, on sait de qui ils répondent.

Au regard des vives critiques sur la place illégale et illégitime qu’elle s’était donnée dans les affaires du pays, la maisonnée du président de la République a compris qu’il fallait qu’elle soit de moins en moins visible pour limiter l’overdose de frustration que suscitait son omniprésence. Mais dans les faits, elle est toujours là à travers ses hommes liges à la présidence de la République, au gouvernement et dans le parti.

Malheureusement le problème du pouvoir d’Ali Bongo reste entier : (1) quid du bilan après 14 ans sur le fauteuil présidentiel ? (2) quid des réelles capacités du président de la République à gouverner lui-même le pays ? (3) quid de l’état général du système qui a toujours garanti la pérennité du pouvoir des Bongo Ondimba ?

Après ce Congrès sans consistance et au regard de la platitude des cadres dudit parti, il est clair qu’ils se sont disqualifiés pour tenter une aventure politique à la André Mba Obame en 2023. Deux réalités freineront leur légitime ambition.

D’abord ils ne seront pas pris au sérieux comme ce fut le cas pour AMO en 2009 lorsqu’il sort du PDG. Puis, ils subiront la même critique que Guy Nzouba Ndama en 2016 face à Jean Ping. C’est-à-dire qu’il était venu trop tard dans les rangs de l’opposition quand Jean Ping avait pris de l’avance en sillonnant le pays.

Dès cet instant, seuls les partis crédibles alliés au PDG ou des cadres respectés de l’administration auront encore la possibilité de s’affranchir de cette « alliance » et de se positionner pour la course présidentielle. Le schisme ou le parricide politique pour crédibiliser toute candidature d’un membre ambitieux du PDG devait se faire au moment de ce Congrès.

Étant donné que rien n’est clair du côté de la majorité au pouvoir, il est évident que cette situation est à l’avantage de l’opposition.

En effet, après toutes les tares de gestion accumulées, le pouvoir en place fait une très grosse erreur d’appréciation en voulant combattre Alexandre Barro Chambrier (ABC), Paulette Missambo et Guy Nzouba Ndama comme cela a été fait avec Jean Ping.

Les trois principaux acteurs de l’opposition ne traînent pas les mêmes casseroles que Jean Ping. D’abord ils n’ont aucun contentieux avec l’Occident. Or, avec la question de Mouammar Kadhafi, Jean Ping s’était mis à dos des acteurs qui comptent et qui décident.

Dans le combat de leadership des grandes puissances, il n’était pas intéressant pour les Occidentaux de voir un enfant de la Chine sur le fauteuil présidentiel gabonais.

Enfin, en refusant de le plébisciter pour un second mandat à la tête de la Commission de l’Union africaine, certains acteurs politiques gabonais de l’opposition auraient dû comprendre que de nombreux chefs d’État n’étaient plus en phase avec Jean Ping ou ses méthodes de travail. C’est dire qu’ils auraient encore eu moins envie de le retrouver comme pair en tant que président du Gabon.

Par conséquent, vouloir traiter les cas ABC, Paulette Missambo ou Guy Nzouba Ndama comme cela a été fait avec Jean Ping est une faute politique voire un suicide public. Ce d’autant plus que le pouvoir d’Ali Bongo n’a pas cessé de collectionner les maladresses avec l’international.

Le rapprochement du pouvoir d’Ali Bongo avec la Russie ne pouvait plaire ni à la France, notre partenaire historique, encore moins aux États-Unis, la première puissance mondiale. L’adhésion du Gabon au Commonwealth ne pouvait plaire à la France comme l’invitation du parti communiste chinois au Congrès du PDG ne peut pas ravir la Grande-Bretagne. Les différents votes du Gabon au Conseil de sécurité sur la question de la guerre en Ukraine ont fini de convaincre les Occidentaux sur le peu de fiabilité des tenants du pouvoir gabonais.

Une élection présidentielle se jouant à 50℅ au Gabon et à 50℅ à l’international, il est évident qu’en cas de difficulté du pouvoir d’Ali Bongo durant cette échéance électorale, la jurisprudence Jean Ping accouplée à celle de Laurent Gbagbo et Alpha Condé pourrait très vite et très bien s’appliquer.

Les trois principaux profils de l’opposition cités ont des assises à l’international qui ne sont pas du tout négligeables. Si ABC reste un fils du Fonds monétaire international, Paulette Missambo pourrait jouir des acquis de Casimir Oyé Mba, ancien gouverneur respecté de la Banque des États de l’Afrique Centrale (BEAC) dont elle reste l’épouse quand Guy Nzouba Ndama fera peser ses 17 années passées à la tête de l’Assemblée nationale du Gabon.

Sur le plan national, l’état des routes, la vétusté des écoles et autres universités, l’absence de lits et de médicaments dans les hôpitaux dits modernes, les nombreuses arrestations arbitraires, les détournements de fonds grossiers dont ceux du COVID-19, parlent suffisamment pour ceux qui, depuis 2009 et 2016, crient au désastre.

A cela s’ajoute la mauvaise gestion de la ressource humaine dans le pays. Les erreurs de casting et l’hyper délégation du pouvoir présidentiel à des gens illégitimes ont fini de convaincre l’opinion publique sur les réelles capacités du chef de l’État.

Avec tous ces éléments objectivement présentés et vérifiables, comment ne pas croire qu’Ali Bongo est vraiment en grande difficulté pour l’élection présidentielle de 2023 quand l’opposition sincère et déterminée a désormais toutes les chances de rendre possible l’alternance au sommet de l’État.

Le seul contre poids possible face à ces acteurs déterminés de l’opposition reste l’émergence d’un parti allié à la majorité PDG au pouvoir.

Par Télesphore Obame Ngomo

Président de l’OPAM

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