Au début du premier septennat du président de la République, Ali Bongo Ondimba, la société civile et les partis politiques de l’opposition avaient vertement critiqué le fait que la Fondation Sylvia Bongo Ondimba pour la famille puisse émarger dans le budget de l’État à hauteur de plusieurs centaines de millions de francs CFA.
L’argument premier qui avait tout son sens et qui avait été mis en avant au moment de cette dénonciation était le fait que l’action sociale de l’épouse du chef de l’État n’était pas plus représentative voire active que celle de nombreuses autres associations qui œuvrent quotidiennement pour le bien-être des gabonais et le développement du Gabon.
L’exemple d’appel et de collecte des fonds de Bernadette Chirac, l’épouse du président de la République française Jacques Chirac, avait été cité en exemple. Il était dit que la légitimité et la crédibilité de cette dame résidaient dans le fait qu’elle ait créé un mécanisme efficace pour (1) faire adhérer les français à son projet social, mais en plus (2) leurs permettre de participer à son engagement à travers la campagne de collecte des pièces jaunes qui généraient très souvent des millions d’euros.
C’est dire que lorsqu’on veut, on peut. Avec un peu de réflexion et de sincérité dans ce qui est fait, on n’a pas besoin de se greffer au budget de l’État jugé maigre et insuffisant. Effectivement, il y a encore trop de routes inachevées, trop de couveuses à acheter pour les différents hôpitaux du pays, trop de tables- bancs continuent de manquer dans nos écoles pour estimer que l’action dite sociale de la première dame soit financée par l’argent du contribuable. Ce d’autant plus que cette charge financière n’est nullement constitutionnelle.
De cette conception des choses, les actions sociales des premières dames dans le monde n’ont nullement pour but de faire dans le traffic d’influence ou l’enrichissement illicite et personnel. Or, les déclarations de l’ancien directeur général de la Gabon Oil Company (GOC), Patrichi Tanassa, viennent profondément ternir l’idée ou l’image que l’opinion publique se faisait des initiatives de Sylvia Bongo Ondimba.
Pourquoi autant d’argent pour des actions sociales dont l’impact reste à déterminer ou à prouver pour de nombreux gabonais? Un communiqué se voulant de la Fondation Sylvia Bongo Ondimba pour la famille parle de 5 millions de francs CFA reçus quand l’opinion publique a bien entendu Patrichi Tanassa parler de milliards de francs CFA. Stratégiquement, les dirigeants de cette Fondation auraient dû faire régner le silence. Car ce communiqué légitime de fait les assertions faites par Patrichi et s’expose à tout type de commentaire.
Aussi, qui de l’ancien directeur général de la GOC, du cabinet de la Fondation incriminée et du transporteur Jessy Ella Ekogha ne dirait pas la vérité? Tout compte fait, quelqu’un devrait payer le prix au nom de la justice.
Si les magistrats chargés de cette affaire étaient réellement libres, indépendants, professionnels et dignes, ils auraient demandé une confrontation pour vérifier les faits énoncés. Sylvia Bongo Ondimba, son fils Noureddine et tous ceux qui ont été cités étant des justiciables ordinaires, ils auraient dû être invités à la barre. Mais hélas, il ne fallait pas plus pour discréditer, une fois de plus, la justice gabonaise.
Avec cette faute professionnelle grave, la juge française Élodie Meyrianne qui est chargée du dossier des frères Laccruche Alihanga en France, pour détention arbitraire au Gabon, vient d’avoir une bonne raison pour ne vraiment pas faire confiance à la justice gabonaise.
Voici des gens, pourtant assermentés qui, pour des raisons inavouables, préfèrent piétiner sans état d’âme, la dignité et l’image du Gabon. Ces juges gagneraient à savoir comment ont fini leurs prédécesseurs qui ont géré le procès regrettable du capitaine Mandza, exécuté à Hollando.
En plus, après ces accusations précises sur le mode d’acquisition étrange desdits fonds colossaux, non seulement la première dame et tous les cités ne se sont pas pointés au tribunal pour apporter les précisions ou le démenti attendu. Pire, Patrichi Tanassa en a pris pour son matricule, 12 ans d’emprisonnement.
Comment alors ne pas faire croire à l’opinion publique que la décision rendue ne porte pas une signature venue d’ailleurs en guise de représailles? De facto, c’est la première dame qui paie, pour le moment, le prix fort en termes d’image et de crédibilité.
Car, ce n’est pas cette idée qu’on se fait du rôle de la première dame d’un pays qui se veut sérieux et respectable. Les mélanges de genre observés et dénoncés par l’opinion publique lorsque l’épouse du chef de l’État, par deux fois déjà, s’est autorisée des séances de travail, rendues publiques, avec la cheffe du gouvernement et de nombreux ministres pourraient conforter ces accusations dégueulasses patrichiennes.
Le caractère bancal de cette manière de faire n’a vraiment rien de républicain. L’épouse du président de la République n’a pas à outrepasser son statut pour quasiment épouser celui de son époux. C’est une posture qui n’a pas rendu service aux critiques acerbes faites sur l’état de santé fragilisé d’Ali Bongo Ondimba. Une sorte d’imposture qui a agacé des milliers de gabonais.
De mémoire collective, cette intrusion de l’épouse du président de la République dans les affaires de l’État ne s’est jamais bien terminée. Leïla Trabelsi, la femme de Ben Ali, l’ex président de la République de Tunisie avait écopé de 35 ans de prison ferme par contumace à cause de son rôle impertinent aux côtés de son époux et pour détournement de fonds publics.
L’influence devenue nocive de l’épouse de Robert Mugabe avait accéléré son départ du pouvoir après plusieurs décennies de règne. Le rôle néfaste d’Elena Ceauşescu en Roumanie et d’Alexandra Feodorovna Romanova de Russie n’a pas offert une fin heureuse à leur époux respectif, Nicolas Ceausescu et Nicolas 2 encore appelé le Tsar Nicolas.
La justice gabonaise, à travers les magistrats qui ont géré cette affaire de manière cavalière, en refusant de traiter tous les cités comme des justiciables ordinaires, après avoir été publiquement nommés par Patrichi Tanassa, leurs ont offert le pire des jugements. Celui de la condamnation et le mépris de l’opinion publique.
Autrement dit, l’image et les actions de Sylvia Bongo Ondimba auprès des gabonais épris de justice ne seront plus jamais appréciées de la même manière. Et c’est dommage.
Par conséquent, la campagne octobre rose organisée par la fondation Sylvia Bongo Ondimba pour la famille pourrait devenir un octobre sclérosé. La République, nul n’a le droit d’être enculé comme cela avait été vulgairement prononcé à Ryad.
Toutes les personnes ou personnalités qui ont été citées par l’ancien directeur général de la GOC dans le cadre des détournements de fonds publics dont il serait l’auteur doivent comparaître devant le juge dans le respect des lois en vigueur en république gabonaise.
Attaquer la presse libre devenue gênante ne répare pas ou n’efface pas ce viol public qui a été fait à la justice gabonaise. Tenter de salir la presse libre en pensant qu’elle ne commenterait pas ce feuilleton scandaleux, c’était mal connaître les différents acteurs faussement accusés. Surtout que c’était pathétique de faire dire à un prisonnier, ce qu’il n’a jamais dit.
Comme il est dit » à toute chose, malheur est bon. Autrement dit, l’opinion publique et les représentations diplomatiques en poste au Gabon savent désormais quels sont les responsables des médias qui empêchent certains ennemis de la République de tourner en rond. Vous avez dit octobre rose, la presse gabonaise dira désormais octobre sclérosé. C’est tout.
Par Télesphore Obame Ngomo