Alors qu’elle se rendait à Libreville pour une session de formation sur le journalisme environnemental et le data journalisme, elle s’est vue interdire l’entrée sur le territoire national par la PAF.
Les faits se sont déroulés du lundi au mardi 4 avril 2023 à l’aéroport de Libreville. Elle est arrivée via un vol Afrijet aux environs de 16h. Au contrôle du poste de police de la PAF, elle a déclaré sa profession de journaliste et le motif de sa visite au Gabon, sans oublier de présenter son billet et sa réservation d’hôtel.
Elle n’a pas été autorisée à rentrer sur le territoire, on lui a demandé d’appeler une personne contact et c’était moi. Je me suis rendu à ADL pour m’enquérir de la situation. Sur place, j’ai trouvé un Lieutenant compréhensif, qui m’a informé qu’il procédait à quelques vérifications.
Je vous abrège de certains détails (tralala, coup de phone ici et là), jusqu’à 21 h 00 aucun motif avancé par les agents ne justifiait sa détention. Ils m’ont demandé de rentrer et qu’ils allaient « bien s’occuper d’elle ». Je suis rentré après avoir laissé ma consœur avec un repas.
Avec le président de son association depuis Yaoundé, nous avons décidé de modifier son billet et de lui permettre de retourner au Cameroun. Nous avons tenté de la joindre toute la nuit, sans succès.
Au petit matin, je me suis rendu à l’aéroport. J’ai précisé au Lieutenant en poste, que vu la détention sans motif valable de ma consœur, nous avions modifié son billet pour lui permettre de rentrer chez elle. Il a contacté son Chef et j’ai été conduit à l’endroit où elle avait passé sa nuit.
Lorsqu’elle m’a vue, elle était en colère « Boursier, pourquoi on me traite comme une prisonnière, qu’ai-je fait ? J’ai dormi sur une chaise, ils m’ont dessaisi de mon passeport et de mon téléphone », j’avais compris pourquoi elle n’était plus joignable.
Le ton montait, j’ai calmé ma consœur en lui disant que c’était fini, qu’elle rentrait chez elle et que je lui demandais pardon pour cet incident. Vous savez dans ce genre de situation, un mot ou une expression et on vous colle un motif fallacieux pour vous causer des problèmes.
J’ai poliment remercié les agents de la PAF en leur précisant que nous avions aussi annulé la venue d’un formateur togolais, qui avait déjà bénéficié du e-Visa afin d’éviter qu’il subisse la même chose.
Pour les agents de la PAF, ils agiraient selon le « principe » et les « textes ». Pardonnez-moi, je suis bête et j’ai demandé aux agents, puis-je voir ce texte ? J’ai signifié qu’en tant que journaliste, j’ai été dans des pays où j’ai connu quasiment tous les contextes : élection, guerre, coup d’état, etc… Et jamais je n’ai été gardé dans un aéroport pour ma fonction.
Et que dire du texte sur la libre circulation en zone CEMAC en son article 3, qui précise que « Les ressortissants des Etats membres de la Communauté qui voyagent ou séjournent sur le territoire d’un autre État membre jouissant, à l’exception des droits politiques, de tous les droits et libertés reconnus aux nationaux du pays hôte sous réserve du respect des lois et règlements en vigueur dans ledit État ». Il n’est nullement mentionné que ce texte s’applique à tous, sauf pour des journalistes. Pour les agents, c’est le « principe » qui régit leur réaction.
Pour la petite histoire, j’avais été interpellé par ces derniers alors que j’effectuais un voyage vers un pays d’Afrique de l’ouest. Ils m’avaient pris mon passeport, mon billet, ma lettre d’invitation pour les photocopier pendant que je subissais un interrogatoire des plus abruptes pour quelqu’un qui quittait momentanément son pays.
Marielou a été escortée par un agent de la PAF en ma présence jusqu’à la salle d’embarquement. Elle est bien rentrée chez elle au Cameroun et fera sans doute une déclaration de presse dans les prochains jours.
Être journaliste au Gabon est un crime.
Boursier Tchibinda