Gabon/Musique : L’apport culturel de Benjamin Epps est indéniable.

On apprend beaucoup à considérer Benjamin Epps au prisme de la sociologie économique. Il va de soi que, l’évaluation de certains artistes peut comporter son lot de difficultés. Toutefois, il assume la dualité entre création artistique et innovation économique qui est au cœur de sa condition. C’est une matrice sociale qu’il doit organiser pour pouvoir créer.

Or, lorsqu’on parle de l’évaluation de Benjamin Epps, il est souvent question davantage de défis que de limites techniques. Le rappeur d’origine gabonaise est le croisement de deux dynamiques : la dynamique de densification artistique dont il est le seul maître et juge puis la dynamique de mise en valeur économique déterminée par plusieurs facteurs, incluant le marché. L’enjeu pour lui est donc de mettre en synergie ces deux dynamiques, dont les rythmes sont totalement désynchronisés : temps long et irrégulier de la maturation artistique, temps court et régulier de la valorisation économique des productions.

Benjamin Epps est un véhicule d’investissement, toutefois la valeur qui lui est attribuée peut être source de polémique. Par exemple, la tenue du concert du 25 mars dernier à l’Institut Français du Gabon (IFG) du rappeur a récemment fait controverse. Bien que les caractéristiques physiques influencent les évaluations, sa valeur musicale est fortement dictée par l’apport culturel collectivement qu’on lui attribue. Au-delà de la taille et de la condition de son concert unique, son premier album « La grande désillusion » est considéré comme ayant un plus grand apport culturel. Ainsi, plus il obtiendra une grande reconnaissance des individus actifs dans le milieu de la musique, plus la valeur de ses œuvres sera élevée.

Il est également pertinent de souligner que tous les Gabonais ne font pas la même lecture de la reconnaissance collective qui lui a été attribuée notamment en remportant la récompense du Best flow international au BET Hip-Hop Awards 2022. L’ambiguïté face à l’apport culturel collectivement accordé à Benjamin Epps, et l’incertitude relative à la reconnaissance de cet apport sont complexes. Car, la frontière entre les efforts d’évaluation et ceux de valorisation visant la création de valeur est souvent mince. Les conditions de la production artistique, qui permettent de montrer que s’il a toujours eu un aspect économique à gérer, sa condition contemporaine est encore plus marquée en ce sens.

La valorisation est critique dans la mesure où la valeur de Benjamin Epps entretient un aspect performatif. Effectivement, plus sa musique s’apprécie, plus il s’appréciera.

Serge Kevin Biyoghe

Rédacteur en Chef, Journaliste-Ecrivain, Sociétaire de la SCAM (Société Civile des Auteurs Multimédias), membre de la SGDL (Société des Gens De Lettres), membre du SFCC (Syndicat Français de la Critique de Cinéma), membre de l'UDEG (Union Des Écrivains Gabonais).

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