Le Gabon a initié depuis 2009 l’accélération de la transformation du bois. Le gouvernement, en créant une zone de 1 200 hectares à Nkok dédiée en grande partie à l’industrie du bois, à 27 km de Libreville, s’est donné les moyens d’atteindre son objectif. Mais le gouvernement doit scruter les productions et les coupes pour maintenir une gestion durable des forêts.
Interdire l’exportation des grumes, c’est la solution trouvée par le gouvernement comme alternative au pétrole d’une part, et pour impulser la diversification de l’économie qui repose sur les hydrocarbures et le manganèse d’autre part. Le Gabon était, de ce fait, déterminé à augmenter les revenus générés par la taxe sur la valeur ajoutée des produits forestiers, le bois principalement. Il est à cet effet le seul pays à le faire en Afrique Centrale.
Cette mesure a permis à la filière bois de se réinventer avec la création des entreprises, des emplois et l’ouverture vers de nouveaux marchés. Alors que l’instauration de l’interdiction d’exporter les grumes avait diminué les coupes de bois, le boom de la transformation a fait croître la demande et, par conséquent, la production. La récolte des bois est passée de 1,9 millions en 2012 à 3,7 millions de mètres cubes en 2021 selon la revue « Brèves Économiques d’Afrique Centrale » de janvier 2022 du Service Économique Régional du Trésor français. Sans la concurrence des acheteurs étrangers, les prix sont devenus compétitifs en dix ans.
Toutefois, Alain Karsenty, un économiste au Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CIRAD), attire l’attention sur la pression exercée par cette industrie devenue gourmande en essences, surtout celles de qualité supérieure. Il explique que le danger viendra de la surcapacité de transformation qui entraînera, de fait, une augmentation des coupes en forêt pour alimenter les usines. C’est la source du productivisme. S’il s’installe, il aura un impact considérable sur la gestion durable et rationnelle des forêts.
L’alternative se trouve dans un allègement de la pression sur les essences les plus connues, soit 10 à 15 essences exploitées dans le bassin du Congo sur plus de 500 répertoriées. « L’investissement massif dans l’industrie du bois au moment où la rente des forêts primaires baisse doit être accompagnée d’aménagements », explique Benoît Jobbé-Duval, directeur de l’Association Technique Internationale des Bois Tropicaux (ATIBT). « Il ne devrait pas y avoir d’impact sur la durabilité des forêts, si la production se répartit sur un plus grand nombre d’essences. »
La diversification des essences exploitées suggérée par Benoît Jobbé-Duval nécessite une implication effective des industries, des consommateurs et du gouvernement. Car la demande en bois est forte et le marché est loin d’être saturé puisque la Chine, par exemple, parvient à absorber la moitié de la production gabonaise.
Cette augmentation de la production fait naître une ambivalence entre le désir du gouvernement de renforcer ce secteur d’activité et le respect de ses engagements environnementaux. Car faut-il le rappeler, le Gabon est partie prenante de l’Initiative pour la forêt de l’Afrique centrale (CAFI), un programme de gestion durable des forêts piloté par la Norvège qui vise la réduction des émissions de CO2. Un processus de certification des concessions forestières est également en cours avec le partenariat du Forest Stewardship Council (FSC).