Le 29 novembre 2019, au moment où l’opération scorpion faisait ses premiers pas et s’apprêtait à piquer l’ancien directeur de cabinet du président de la République, Brice Laccruche Alihanga, dans la rubrique « le vrai débat est là « , nous titrons jadis » Attention à la vacance du pouvoir « .
En effet, dans cet article qu’on peut désormais qualifié de prémonitoire, nous rappelions aux nouveaux animateurs du sommet de l’État quelques principes censés guider les hommes de pouvoir, au pouvoir. Nous précisions par la même occasion les éventuelles conséquences qui pourraient advenir si et seulement si ces principes n’étaient pas respectés.
La nécessité de préserver la « raison d’état » fut mise en avant afin d’attirer l’attention des manœuvriers surexcités. On ne peut avoir été à ce niveau de pouvoir, à une période où aucun dossier sensible de la République ne vous échappe, complices comme cul et chemise, et par un quelconque désaccord, se retrouver dans la position actuelle de l’ancien directeur de cabinet du président de la République. Ce n’est pas normal.
Sous d’autres cieux, les exemples sont quasi inexistants. Quid des désaccords profonds entre Charles Pasqua et Jacques Chirac, entre François Mitterrand et François de Grossouvre par exemple. La raison d’état a toujours primé et a été gérée différemment. C’est dire la violence de la transgression qui est faite dans notre pays. En République démocratique du Congo, Félix Tshisekedi a dû libérer son ancien directeur de cabinet qui n’en savait pas autant que Brice Laccruche Alihanga des réalités du pouvoir en place.
Des formules pour ne pas perdre la face abondent pourtant. Or, dans le cadre du Gabon, malgré l’avis de la commission des droits de l’homme de l’ONU, les acteurs à la manœuvre refusent d’entendre raison. C’est dire que nous sommes désormais dans un acharnement ou dans la loi du plus fort. Ce qui n’est plus la justice mais un règlement de compte. Ce n’est pas acceptable car nul ne serait finalement à l’abri.
La cabale engagée contre Brice Laccruche Alihanga pour le jeter en prison n’était pas digne de la philosophie du pouvoir selon Omar Bongo Ondimba, qui plane encore sur le Gabon. Trop de modus vivendi pouvaient être mis en place pour éviter à la République de se retrouver autant ridiculiser comme c’est le cas. Un pays sans raison d’état est un pays fou. Le Gabon serait-il devenu fou? Tout prête à répondre par l’affirmative. Mais que pouvait- on espérer lorsqu’on mettait à la tête du pays des gens sans expérience et sans consistance? Mobutu aurait certainement ajouté sans éducation.
Le plus difficile à concevoir n’est pas la séance de gaminerie au sommet de l’État mais le silence de certains anciens. Notre pays n’aurait-il plus des gens capables de taper du poing sur la table pour dire Stop, ça suffit? Ou serions-nous dans la philosophie napoléonienne qui dit » il ne faut pas perturber un ennemi qui fait des erreurs »?
Des témoignages concordants nous rapportent que Georges Rawiri, Julien Mpouhot Epigat, André Oyini pour ne citer que ceux-là savaient dire NON et STOP à Albert Bernard Bongo, le président de la République, lorsqu’ils estimaient que la ligne rouge venait ou pouvait être franchie.
Bien heureusement que les lois, les traités et autres accords internationaux existent. Notre pays les ayant ratifiés, ses dirigeants sont contraints de les respecter. Aussi, c’est de la commission des droits de l’homme de l’ONU, qui n’est nullement redevable à Brice Laccruche Alihanga qu’est venu le premier marteau sur la tête de nos collégiens du bord de mer qui se croyaient dans une cour de récréation pour enfants gâtés.
C’est en toute objectivité, sur la base des différents éléments fournis par toutes les parties que cette commission est venue affirmer que l’opération scorpion appliquait « un espèce de droit » qui ne correspond à rien du tout sinon à de la pure dictature. En d’autres mots, l’arrestation et la détention des frères Laccruche Alihanga sont tout simplement arbitraires. Cet avis humilia la justice de notre pays dont l’indépendance, son fondement existentiel, fut remis en cause.
Au lieu de se conformer à la conclusion de ce qui avait été dit par la commission des droits de l’homme de l’ONU, le pouvoir gabonais tenus par des collégiens sans tenue réglementaire engagea un bras de fer, malheureusement suicidaire. Ce qui dénote une parfaite méconnaissance du fonctionnement des institutions internationales qui savent conjuguer les verbes attendre et sanctionner le moment venu. Il gagnerait à interroger l’histoire ou des acteurs comme Jean Ping.
Comme si cet affront risqué ne suffisait pas, des désaccords divers avec les autorités françaises amenèrent certains acteurs au sommet de l’État à faire dans du chantage avec la fameuse adhésion du Gabon au Commonwealth. Or, sur cette question, les promoteurs de cette affaire floue n’ont jamais expliqué au peuple gabonais ce qu’il gagnerait avec et dans cette nouvelle trouvaille londonienne. Et dire que, pour une telle question, un référendum aurait été plus judicieux, plus légitime. Mais hélas, vous avez dit collégiens…
Pour enfoncer le clou dans cette avalanche de bêtises et de défiance, le Gabon est amené à faire un rapprochement provocateur avec la Russie à une période où les cas malien et centrafricain agacent déjà au plus haut point. Pour couronner le tout, les différents votes du Gabon au conseil de sécurité de l’ONU ont plutôt été favorables à la Russie qu’à l’Occident. Dans quel intérêt si ce n’est se fâcher avec plus forts? Et la ligne rouge fut franchie.
Pas une, pas deux, en plein entre deux tours de la présidentielle française, Emmanuel Macron dépêcha son chef d’état-major de l’armée pour comprendre les caprices mortels du Gabon. C’est par deux actes forts que l’opinion publique a bien compris que les réponses données à la France n’ont pas été satisfaisantes.
Aussi, le pays de De Gaulle explosa les carcans de la diplomatie. La justice française rendit aussitôt une décision mettant en examen quatre enfants d’Omar Bongo Ondimba dans la question des biens mal acquis. Et ce n’est pas fini. Cela correspond bien à la construction d’un profil type en vue d’un objectif imaginable.
Dans le même temps, on nous informe que Noureddine Bongo Valentin a été convoqué par le juge français dans le cadre de la détention arbitraire des frères Laccruche Alihanga. A ce niveau des débats, il faut juste se poser la question de savoir: qui a déjà été entendu et aurait trahi le fils aîné d’Ali Bongo Ondimba puisqu’il est clairement dit qu’il serait directement impliqué dans ce dossier. Il est clair que la suite de cette affaire risque d’être violente. Il faudra s’attendre à une mise en examen puis un mandat d’arrêt international si ce citoyen français ne coopère pas. La jurisprudence Teodoro Nguema Obiang, fils du président de la Guinée équatoriale, va inévitablement s’appliquer au grand regret du fils d’Ali Bongo.
Au lieu d’engager des démarches pour chercher l’apaisement, c’est un article sulfureux et irréfléchi sur le manganèse, Eramet, Comilog, la France et le Gabon qu’un site internet proche de l’infographe du bord de mer a pondu pensant faire la morale à la France. A ce niveau, une seule question casserait la baraque: « quid de l’argent du redressement d’Eramet il y a quelques années. Autrement dit, si Eramet doit payer au Gabon une meilleure part de ce qu’il gagne sur son sol, mais quelle direction a d’abord pris les différents paiements faits par cette entreprise ? C’est à ce niveau que le bras de fer se complique pour nos apprentis.
Enfin, lorsque certains décident d’engager une telle défiance à l’endroit de la France voire de l’Occident, ils comptent sur quoi ou sur qui? Bénéficent-ils d’une légitimité populaire? On peut dire non. Ont-ils posé des actes qui modifient radicalement le quotidien des gabonais qui, par reconnaissance pourraient se soulever? La réponse est non. A quoi donc rime ce cinéma de mauvaise facture?
Certains devraient comprendre que s’ils ont la capacité d’emmerder les entreprises françaises, le pouvoir français qui est foncièrement gaulliste a la capacité de défendre ses intérêts quitte à changer les acteurs au sommet d’un État. Les cas sont légions.
Par conséquent, il serait bon de jouer balle à terre à un moment où Ali Bongo Ondimba est durement fragilisé par la maladie. Ce d’autant plus que le pouvoir détenu par les Bongo est désormais considéré comme un ex allié historique de la France par la presse française. C’est dire qu’un processus est plus que jamais enclenché. Les jours à venir, pour ces acteurs suicidaires clairement identifiés, après la victoire d’Emmanuel Macron, pourraient être sport. Nous disions en 2019, Attention à la vacance du pouvoir. Nous y sommes quasiment malgré l’agitation des zélés du PDG.
Par Télesphore Obame Ngomo