Nommé lors du conseil des ministres du 18 mai, membre du Conseil d’administration du Rwanda Development Board, l’ancien chef de cabinet d’Ali Bongo Liban Soleman est sous les feux de rampe tant cette nomination divise au Gabon.
Jamais nomination n’a fait autant jaser dans le landerneau gabonais. Les réactions sont diverses entre ceux qui se montrent fiers de la confiance accordée par Paul Kagame à un Gabonais et, d’autres, moins laudatifs, parlent de trahison et vouent aux gémonies Liban Soleman.
Le Rwanda Development Board est un organisme gouvernemental créé en 2008 par Paul Kagame pour attirer les investisseurs étrangers au Rwanda. C’est une fenêtre qui vante les performances du Rwanda à l’étranger. Quand on connaît la rigueur et la méticulosité qui caractérisent Paul Kagame dans le choix des hommes, la nomination de Liban Soleman au conseil d’administration de cet organisme stratégique Rwandais n’a rien d’hasardeux.
Diplômé en finance de la Georges Mason University aux Etats-unis, Liban Soleman avait piloté sur le plan local, le Plan Stratégique Gabon Emergent, projet politique qui devait permettre à Ali Bongo de mettre le Gabon sur la rampe de développement dès 2009. C’est donc sans surprise qu’il rejoint le cabinet présidentiel comme chef de cabinet de 2011 à 2016. Avant sa nomination comme ambassadeur en Arabie Saoudite, il a dirigé l’Agence nationale de promotion des investissements, le penchant gabonais du Rwanda Development Board.
C’est à partir de 2018 que les relations entre Liban Soleman et le tout puissant directeur de cabinet d’Ali d’alors Brice Laccruche Aliyanga vont devenir délétères. La conséquence sera son affectation en Arabie Saoudite comme ambassadeur. Mais cette affaire survient au moment ou l’avc d’Ali est encore pendante. Mieux, l’ancien ambassadeur du Gabon en poste à Riyad Ismael Gnamale Ngoungou Oligui qui avait géré de main de maître cette affaire d’avc, avait noué des liens solides aussi bien dans le milieu Saoudien que Gabonais. Et pour ne pas arranger la situation, les saoudiens vont tergiverser autour de cette nomination qui ne leur avait pas été proposée avant la confirmation. D’où le statut quo.
C’est pour ne pas tourner en rond que Liban Soleman va décider de s’inscrire à l’université d’Harvard aux Etats-Unis pour faire une formation en Développement du leadership. Il faut attendre la chute du faucon blanc, dès décembre 2019 pour voir sa situation s’éclaircir. Trop tard. Car, connu pour être un fin réseauteur, Liban n’a pas chômé. Selon Jeune Afrique, Liban Soleman va utiliser son carnet d’adresse pour se prévaloir. Partenaire du cabinet conseil African initiatives for development basé à Dubaï, il sert de pont entre les investissements Emiratis et l’Afrique. Il est aussi membre et conseiller de plusieurs think thanks africains comme l’Institut Amadeus de Brahim Fassi Fihri, la Fondation Tomorrow de Maggie Gu, puissante femme d’affaire de Hong-Kong dont Liban est le principal conseiller.
C’est donc une tête bien faite et au carnet d’adresses fourni que le Gabon vient de perdre. Son profil aurait fait des étincelles auprès de Kagame qui n’a pas hésité à le prendre sous son aile. Victime au Gabon des luttes intestines que se livrent les clans pour le contrôle du bord de mer, Liban Soleman, avec l’accord d’Ali Bongo, a décidé de se consacrer uniquement au secteur privé. Car le statut général de la fonction publique n’autorise pas un ambassadeur régulièrement nommé, à accéder à une autre nomination, sauf dérogation expresse du président de la République. Liban ayant eu le quitus d’Ali Bongo Ondimba, il peut désormais siéger en tant que membre du conseil d’administration du Rwanda Board Development à Kigali. Il n’est pas d’ailleurs le seul étranger dans ce conseil d’administration. Un Ivoirien y siège aussi. Alors pourquoi la polémique ?
Un habitué du landerneau politique a eu des mots assez durs pour expliquer ce qu’il considère comme une polémique stérile: « Vous savez, au Gabon, on a l’habitude de mélanger les torchons et les serviettes. Pour ne prendre que cet exemple. Regardez la présidence de la République, vous y trouverez de tout. Des sans diplômes aux postes stratégiques parce que bénéficiant de la proximité avec le prince ou du fils à qui on demande de pondre des stratégies. Mais à côté, il y a aussi des diplômés et de vrais stratèges comme Liban Soleman à qui les premiers, plus bruyants, ont livré des combats épiques inutiles. C’est maintenant qu’on se rend compte de son importance parce que dans l’environnement Gabonais, on coupe les têtes de ceux qui veulent émerger. Le nivellement se fait par le haut. »