Le Centre Gabonais des Élections (CGE) n’a encore rien communiqué sur la date de convocation du corps électoral pour les prochaines élections que les services de la présidence de la République filent déjà l’information à l’hebdomadaire Jeune Afrique. Le journal de Béchir Ben Yamed, citant ses sources – gouvernement et cabinet du président de la République – donne en primeur cette information : les élections présidentielle et législatives, se tiendront le samedi 2 septembre 2023.
Bon scoop ! Mais, qui doit décider de la date des élections au Gabon ?
Le journaliste peut parfois mettre en danger ou, à tout le moins, en difficulté ses sources d’information.
C’est ce qui arrive à Jeune Afrique, cet habitué des palais présidentiels et des lambris dorés ayant toujours fait l’objet d’un traitement de faveur. Mais quand on est dans un tel confort, on finit par oublier les petites règles. Une collecte sérieuse de l’information aurait dû amener l’envoyé spécial de l’hebdomadaire panafricain à se poser la simple question de savoir qui, au Gabon, fixe la date des élections ? En parcourant le code électoral, il devait tomber sur l’article 74 qui est clair :
« Le Centre Gabonais des Élections arrête la date de convocation des électeurs.
Cette date est matérialisée par décret pris en conseil des ministres, sur proposition du ministre de l’Intérieur. La publication au Journal Officiel ou dans un journal d’annonces légales du décret de convocation doit être effectuée au plus trente jours avant le scrutin.»
Jusqu’à ce jour, le Centre Gabonais des Élections (CGE) n’a fait aucune communication sur la date des élections. Quant au gouvernement le dernier conseil des ministres n’a rien dit sur la convocation du collège électoral. Le « scoop » de Jeune Afrique vient de confirmer la duplicité qui existe depuis toujours entre le pouvoir Bongo PDG et les commissions électorales successives. On sait désormais que c’est à la présidence de la République et au gouvernement que tout se décide. Le CGE n’est qu’une chambre d’enregistrement, tout comme l’Assemblée nationale et le Sénat.
Diantre, comment les membres d’un gouvernement et les hauts fonctionnaires de la présidence de la République peuvent-ils ignorer de cette manière la loi ?
Non seulement ce n’est pas à eux de fixer la date de l’élection présidentielle mais, en plus, le jour choisi pour la tenir pose, lui aussi, problème par rapport à la Constitution. Si l’on respecte la loi fondamentale, l’élection présidentielle de cette année doit se tenir au plus tard le 26 août, c’est-à-dire un mois au plus tard avant la fin du mandat en cours, Ali Bongo ayant été investi le mardi 27 septembre 2016.
Voilà un autre acte qui indique clairement que le pouvoir Bongo PDG marche allègrement sur la Constitution. Quel crédit peut avoir cet organe chargé de la gestion des élections, qui a à sa tête un ancien ministre fraîchement sorti du gouvernement et qui accepte que d’autres instances décident à place ? Il est désormais clair qu’un tel CGE ne peut jamais annoncer la défaite du président sortant, même s’il est laminé par le vote des Gabonais, comme cela semble se dessiner. Les expériences de 2009 et 2016 n’ont-elles pas suffi pour que le pouvoir Bongo PDG prenne enfin conscience du danger qu’il y a à toujours tripatouiller les élections ?
Ça commence toujours par le non-respect de la loi électorale, les petits arrangements d’arrière boutique entre commissaires électoraux, la violation de la Constitution et in fine la modification des résultats du vote, pour se terminer par un bain de sang. On est bien loin des élections apaisées dont parlait M. Ali Bongo. A ce rythme, il faut plutôt s’attendre à des lendemains électoraux très agités !
François ONDO EDOU