Il y a 1 semaine, j’écrivais le post dont le ci-dessous sous le titre évocateur de Quel peuple déprimant et désespérant! Contre toute attente, depuis la naissance du billet sarcastique il y a plus de 4 ans, c’est le texte qui a suscité le plus de réactions de la part de ma communauté virtuelle. Il a visiblement interpellé la conscience individuelle et collective qu’il a touché 88 486 personnes, suscité 10 167 interactions et a été partagé 770 fois. Il continue de l’être à ce jour.
Est-ce un hasard qu’un post qui traite de l’incroyable capacité de nos compatriotes à passer d’un sujet sérieux qui engage leur quotidien à une banalité qui ne le change pas, de leur propension à pleurer sur un drame et à en rire par la suite, touche autant de personnes, gabonais ou non? Je ne le crois pas. Au contraire, il y a comme une fatalité chez les gabonais qui a fini par les convaincre de l’impossibilité de changement quoiqu’ils fassent. Ils ont appris à tout banaliser, à tout ridiculiser et à tout relativiser.
Dans cette autodérision permanente, quand ils ne ridiculisent pas eux-mêmes leurs propres luttes ou leurs propres indignations, en se trouvant toutes sortes de prétextes pour y renoncer, ils se se convainquent pour se consoler dans une comparaison absurde qui révèle leur faible niveau de conscience, le Gabon d’aujourd’hui et le Gabon d’hier. Le Gabon d’ABO et celui d’OBO. Le premier étant selon eux, infiniment meilleur que le dernier.
Ils en sont si convaincus qu’essayer de leur expliquer que préférer l’un ou l’autre de ces deux Gabon, c’est comme choisir entre la peste et le choléra. Quoiqu’il arrive, les deux vous conduisent ad patres. Ils ne le comprennent pas, tant ils sont englués dans ces contradictions permanentes qui font que ce peuple en définitive n’a plus d’âme, plus d’esprit et plus de raison, au point que ses actions sont en permanence déstabilisantes par leur contradiction évidente.
Le peuple gabonais souffre du syndrome de la mémoire fantôme. Ce dysfonctionnement du cerveau qui fait croire à celui qui a été amputé d’une jambe, qu’il peut encore se gratter l’orteil de cette jambe désormais inexistante. Courir indéfiniment derrière ce qui n’existe plus plutôt que de tenter de se créer un nouvel avenir, tel est le grand dilemme de ce peuple qui a plus besoin d’une révolution mentale que d’une révolution populaire.
Sa conscience devenue résiduelle par tant d’absurdités répétitives, il ne s’indigne plus qu’au moment où il est frappé par le sort. Jamais avant, jamais durablement et jamais après, pour forcer et changer son destin. Comme cette tragédie de l’Esther-Miracle, où il s’est soudain rendu compte de toutes ces insuffisances et de toutes ces incompétences qui sont la cause de ce malheur. Mais tant que le pire n’était pas arrivé, rien n’était assez grave pour qu’il s’en offusque.
Ni le gouvernement, ni les autorités portuaires, ni les compagnies de navigation, ni les passagers devenus les victimes, ni les parents des victimes, ni les politiciens, ni la société civile et ni même le peuple qui est solidaire aujourd’hui des familles endeuillées, ne s’étaient indignés des conditions de navigation de ces rafiots qu’on surcharge à chaque traversée depuis la nuit des temps. Et pourtant chacun savait ce qui s’y passe depuis des lustres.
Mais tout le monde regardait ailleurs. Comme on fait pour le transport routier, pour le transport ferroviaire et pour le transport aérien. Tout va pour le mieux tant que n’est pas survenu le pire qui ne manquera pas d’arriver. Et c’est bien là le drame de ce peuple qui ne réagit que spontanément, conjoncturellement et souvent instinctivement à tous ses malheurs, sans jamais s’inscrire dans une réflexion prospective et actions correctives qui provoqueraient l’amélioration de ses conditions de vie.
Il se lamente quand survient le malheur mais en attendant jouit de ses instants de bonheur. Et puis, basta! Il poursuit sa petite vie pourtant marquée par toutes les insuffisances structurelles et matérielles. Il vit au jour le jour en espérant que son bonheur tombera du ciel et qu’il ne lui appartient nullement et en aucune façon de le provoquer. Tout doit toujours être le fait de l’autre et jamais de soi-même. Et de cet autre qui ne fait rien, il n’est jamais avare de reproches sans jamais se sentir responsable soi-même.
Ce peuple est incapable de réaliser que son pays ne changera pas avec cette mentalité d’esclave qui le caractérise. Pour preuve, voilà 60 ans qu’au moins 3 générations de gabonais y vivotent, sans jamais avoir droit au bonheur que la nature lui a destiné en le dotant d’incommensurables richesses issues de son sol et de son sous-sol. Et pendant qu’il végète ainsi dans son pays, autant de générations d’étrangers y font fortune et vivent la dolce vita en le narguant sur leur propre sol.