Gabon d’abord ou l’Enfer d’abord ?

Ce n’est pas l’intelligence qui est déficitaire dans l’esprit des Gabonais durant cette pandémie du Covid-19, mais bien l’inaptitude constante à capitaliser ces intelligences et à en dégager les initiatives libératrices à vocation collective. Les Gabonais ne seraient-ils pas plutôt au-devant d’un autre défi, celui de dégager des intelligences un espace vital plus libérateur pour la multitude, plus qu’il ne s’agirait de simples intelligences.

Ce constat éclaire significativement la pensée, à propos de nos traditions. A regarder de près, les nombreux clichés qui prétendent définir les Gabonais, procèdent des missions et explorations européennes, auxquelles on devra aussi les divisions ethniques et conflits tribaux dont les séquelles sont encore vivantes même pendant cette crise sanitaire du Coronavirus. Cette influence est le fruit de l’automépris du Gabonais, regardant avec condescendance ses valeurs traditionnelles qui devraient pourtant lui servir de matrice d’inspiration pour amorcer les exigences de la modernité que lui lance cette période sombre.

Les Gabonais doivent être les sujets historiques de leur destin, pièce maîtresse de leur propre histoire, sans subir cette crise sanitaire au même sens d’une fatalité comme si cette tâche devait revenir aux autres peuples, hors de leur bienveillante claire vision.

Il est complexe de parler du Gabon sans souligner la pluralité de catégorie de Gabonais pour cause d’adoption ou de naturalisation. Certes, l’argument de l’aliénation infantilisant à la suite de plusieurs siècles de domination explique, en substrat, cette absence de fierté d’affirmer son identité dans bien des esprits. Il n’est point facile d’effacer les séquelles de domination dans les esprits d’un peuple en proie aux vexations dans son quotidien.

Il convient de s’arrêter durant cette pandémie du Covid-19, sur quel genre de projet de société l’actuel gouvernement qui, au nom de l’efficacité productiviste, doit sacrifier le langage de la raison qui, pourtant, exhorte à mener une vie qualitativement sereine. Le drame est que le reste des Gabonais devient de plus en plus lourd à contrer irrésistiblement sa montée fulgurante qui embarque tout le monde vers l’avidité de tout avoir, toujours plus et réussir seul.

Si le comité de pilotage du plan de veille et de riposte contre l’épidémie à Coronavirus (COPIL) parait submersible devant son devoir d’Etat, pillant, à la manière des étrangers, notre patrimoine commun, comment s’étonner qu’on ait perdu du poids au plan international devant la démission massive de nos classes élitaires dont l’agir vise à reproduire les structures qui garantissent les courbettes et prébendes corrélatives ?

De toute manière, notre grand défi consiste à agir autrement en vue de corriger les errements logiques et moraux qui traduisent notre médiocrité dans nos manières de gérer nos liens avec la propriété commune. Le Gabon s’épuise donc dans les productions à visée exportative que lui imposent les institutions internationales.

Le Gabon devrait plutôt s’assigner pour devoir dans l’avenir, de refuser de se compromettre dans pareilles crises, dont le prix lui est chèrement élevé. A partir d’ici réside la part de notre responsabilité liée à l’imbécilité dans la fracture qui sépare le peuple de ses aspirations dans la gestion du pouvoir. Le malheur des Gabonais provient du COPIL qui regarde les réalités des populations sous la même optique que celle de prédateurs de ses richesses.

L’histoire dira un jour son mot, pas celle des forts et riches, mais cette histoire qui peindra la colère indomptable du peuple épris par le seul désir de vaincre ces forces de la mort qu’inflige la bêtise humaine. Une détermination sincère, prenant corps dans les initiatives non opportunistes.

Serge Kevin Biyoghe

Rédacteur en Chef, Journaliste-Ecrivain, Sociétaire de la SCAM (Société Civile des Auteurs Multimédias), membre de la SGDL (Société des Gens De Lettres), membre du SFCC (Syndicat Français de la Critique de Cinéma), membre de l'UDEG (Union Des Écrivains Gabonais).

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